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Il les appela "Apotres"

IL LES APPELA "APOTRES"

"Prêchez l'Évangile" (Mc 16,15)

 

Nous, les Douze, à la plume qui a voulu reporter nos pensées, nous pardonnons sa témérariété et son incompétence qui a rendu d'une façon seulement impropre et partielle le désir de notre cœur.

Nous lui sommes cependant reconnaissants parce qu'elle s'est servie de nos noms pour rendre gloire à Jésus en le mettant au centre de l'attention. Pour lui nous avons donné la vie, pour lui nous donnons volontiers cette nouvelle... diminution de notre sainteté.

 

TABLE

1 - SIMON PIERRE (de l'obéissance)

2 - ANDRE (de la pauvreté)

3 - JACQUES (de la pauvreté d'esprit)

4 - CELUI . . . (de la chasteté)

5 - PHILIPPE (de la contemplation)

6 - BARTHELEMY (de l'enthousiasme)

7 - MATHIEU (de l'amour aux pécheurs)

8 - THOMAS (de la direction spirituelle)

9 - JACQUES D'ALPHEE (de la parenté)

10 - SIMON, zélote (de l'amour à Jésus)

11 - JUDAS DE JACQUES (de l'identité de Dieu et de l'homme)

12 - MATHIAS (du témoignage)

13 - PAUL (voir Jésus)

14 - MARIE (de l'Eglise)

 

 

SIMON PIERRE

(de l'obéissance)

"un autre te ceindra et te mènera où tu ne veux pas" (Jean 21,18)

J'étais désormais convaincu de ma dignité et de ma fonction.

Le Maître m'avait confié les clefs du Royaume et petit à petit tout le monde s'était adapté à la situation: moi, le premier, le chef. Je pourrais employer un terme convoité et redouté: l'autorité. Moi, l'autorité.

Mais Jésus ce jour-là a dit une phrase qui devait me faire réfléchir et me donner le sens de la vie et la direction de mon attention: "Un autre te mènera où tu ne veux pas".

J'ai compris alors que je dois m'habituer à l'obéissance. Et c'est ainsi que j'essaie de faire. Pour être un véritable chef j'ai le devoir de donner l'exemple aux autres de ce qu'ils sont appelés à être.

Les disciples de mon Maître sont appelés à être obéissants. S'ils n'ont pas un cœur obéissant, ils ne ressemblent pas à Jésus. Si nous n'avons pas un cœur obéissant, nous ne sommes pas des fils comme Jésus, fils de Dieu et de l'homme. Le cœur obéissant est semblable à celui de Jésus, Seigneur et Maître. Il a été toujours attentif aux désirs du Père et il n'a jamais rien fait avec l'esprit d'indépendance et d'autonomie. Il a toujours tout fait en l'unité avec le Père. Avant d'entreprendre n'importe quoi il a attendu des signes.

Je suis, bien sur, le chef des disciples de Jésus, mais je suis aussi l'un de ses disciples. Dans mon cœur doit demeurer l'obéissance.

Dieu seulement est digne d'être obéi. Cela je le sais pour de vrai et je veux te le dire. Mais Dieu peut me parler à travers les hommes. Il peut m'inspirer directement s'il le veut mais j'ai compris que généralement il préfère me manifester sa volonté à travers des choses concrètes, des faits qui arrivent, des frères qui parlent.

C'est pour cela que je dois être attentif à mes frères; Si ne n'avais pas été attentif à eux et je n'avais pas obéi à leur discernement je me serais trompé maintes fois. J'ai appris à faire attention au discernement de ces frères qui aiment Jésus d'un cœur pur et libre de tout conditionnement de j'opinion publique. . Jean m'a fait courir au sépulcre le matin de Pâques. Et ce jour-là a été Pour moi' le plus décisif. Et c'est toujours Jean qui m'a ouvert les yeux pour que je reconnaisse le Seigneur, là sur la plage. Jean aimait Jésus c un enfant.

Moi, j'étais attentif à son discernement. J'étais obéissant.

Ce qui compte, ce n'est pas que je sois l'autorité. L'autorité, ce sont les autres qui la voient toujours en moi, ceux qui reçoivent avec foi, de moi, les signes de la volonté du Père sur eux.

Mais si je ne suis pas obéissant, je ne suis pas l'autorité je ne suis pas la source autorisée. Si je ne suis pas obéissant je ne suis plus le disciple de Jésus. Je ne suis plus le fils du Père. Et alors il vaudrait mieux que personne ne m'obéisse.

L'obéissance - je l'ai découvert tout doucement et à mes frais - c'est plutôt une attitude du cœur que l'acceptation de faire ce que l'on te commande. Quand, pour obéir, j'attends qu'on me le commande, cela signifie que je suis contraint, que je ne suis pas obéissant.

Je ne veux pas obéir aux hommes mais à Dieu.

Je reste attentif et je regarde les hommes car, à travers eux, Dieu peut m donner les signes de sa volonté.

J'ai vu quelqu'un de mes frères se plaindre de moi parce que j'avais donné des ordres trop sages et prévoyants. Il se peut: je n'ai pas l'intelligence de Salomon; le Seigneur le savait bien lorsqu'il m'a confié la tâche. Mais ces frères-là n'obéissaient pas à Dieu, c'est à moi qu'ils obéissaient, voilà la raison de leur inquiétude. Ils ont perdu la juste direction, le nord: en me regardant, ils n'ont vu que moi. Ils ne me ressent pas dans le but d'être obéissants à Dieu. Je n'aime pas que les disciples du Seigneur veuillent me plaire à moi, un homme. J'aime davantage voir quelqu'un, c Paul, me jeter à la face mes distractions, mes désobéissances aux signes de Dieu, mes hypocrisies. C'est ainsi que Paul m'a défendu. Oui, il m'a dé-fendu de la force de la tentation; il m'a défendu afin que je ne devienne pas une pierre d'achoppement pour mes frères. Il s'est aperçu que je n'obéissais plus au Seigneur et il me l'a dit. Dans son cœur il y avait l'esprit d'obéissance à Dieu et il cherchait en moi les signes de la volonté de Dieu. C'est pour cela qu'il m'a prévenu quand il a vu en moi 1'attention aux hommes au lieu que 1'abandon à Dieu.

C'est le salut que d'avoir un cœur obéissant. Un cœur obéissant est able à Dieu et Dieu fait des miracles, de véritables miracles pour celui qui lui obéit. Voyez ma propre histoire: l'obéissance à Dieu m'a procuré des souffrances et la prison. Mais avez-vous vu un miracle aussi grand que celui qui m'a été fait? Sortir de la prison sans que les gardes s'en aperçoivent?

Pour la personne obéissante, le cœur du Père s'attendrit. Je ne veux pas vous -raconter d'autres faits encore car vous-mêmes en ferez l'expérience.

Je me suis aperçu que si je suis obéissant au Seigneur, je suis bien plus attentif aux hommes: en effet j'ai plus de confiance en ce que le Père me dit par leur intermédiaire qu'en ce que je vois avec mes propres yeux. Oh, bien sûr je ferai attention à ne pas me laisser entraîner par le péché de mes frères mais la véritable obéissance ne reste Pas dans les ténèbres. Si un frère essayait de me faire trébucher, le Saint-Esprit ne permettrait pas que l'obéissance reste prise au piège.

Le cœur obéissant ne cherche pas des raisons pour obéir. Sa raison à lui est toute dans l'amour.

Je me suis aperçu que tout secret d'une vie véritable demeure dans l'amour et dans l'amour dé Jésus. Lorsque j'aime de tout mon cœur je deviens s obéissant. Et l'obéissance alors ne me pèse pas, elle devient même pour moi une des manières par laquelle je peux aimer.

L'amour de Jésus! Ce n'est pas pour rien que lui-même a insisté avec moi sur ce point: "M'aimes-tu?".

Jésus était sûr que si je l'aimais je lui aurais obéi et si je l'aime vraiment je cherche de lui être soumis en tout car lui aussi l'était. L'amour véritable, en effet, cherche la ressemblance et rend semblables.

Si j'aime Jésus, je cherche d'être obéissant, si j'aime, Jésus, j'arrive à estimer les autres supérieurs à moi, supérieurs à moi dans l'amour, supérieurs à moi dans la sagesse, supérieurs à moi dans l'intimité avec Dieu. J'ai tout à gagner en aimant Jésus car j'ai tout à gagner si je suis obéissant: je peux jouir en effet de la sagesse, du discernement et de la lumière de plusieurs.

Quand je serai vieux quelqu'un me mènera là où je ne veux pas. Jésus me l'a prédit. Je veux m'habituer dès maintenant à accepter d'être conduit ainsi comme si c'était de la part du Père. Je veux que mon "moi" avec ses exigences, ses goûts et ses attentes meure pour être disponible à tout signe des attentes de Dieu. "Elle est précieuse aux yeux du Seigneur la mort de ses fidèles": cette parole que nous avons souvent chantée me faisait penser aux autres, à ces fidèles qui étaient morts . . . mais maintenant je sens que cette parole est valable pour moi. C'est un moment précieux pour le Royaume de Dieu' ce moment où mes goûts et ma volonté ne viennent ni considérés, ni écoutés. Ces moments-ci existent et existeront. Alors aussi je voudrai être obéissant, obéissant au Père; ainsi que Jésus a été obéissant au Père quand il dirigeait ses pas vers Pilate, vers Hérode, vers le Sanhédrin, vers le Calvaire. Il devait, il était obligé d'aller vers ces directions-là. Ceux qui le voyaient croyaient qu'il était forcé, dans la contrainte. Mais ceux qui le regardaient attentivement pouvaient comprendre qu’en ce moment-là il était libre et, dans sa liberté, il obéissait au Père qui lui communiquait sa volonté par l'intermédiaire de ces voix dissonantes, sans amour. Le cœur obéissant de Jésus savait voir l'amour du Père là oÙ il n'y avait pas l'amour de l’homme. Le cœur obéissant voit la lumière dans la nuit: parce qu'il aime. Le plus grand amour de Jésus nous l'avons vu ce jour-là, en cette obéissance qui, pour lui, était une mort constante.

En conclusion moi, Pierre, je vous avoue que je m'aperçois d'être semblable à Jésus, au Fils de Dieu, et de l'avoir dans mon cœur quand je suis issant.

Je te recommande, à toi, de devenir semblable à lui, d'accueillir son esprit filial et obéissant; alors tu vivras la plénitude de la vie, de la vie divine.

Même si tu auras des tâches de responsabilité, surtout en ce cas, cherche cet amour qui te fait être obéissant.

Tu seras sauvé et tu sauveras plusieurs. Celui qui a reçu tout pouvoir s'est fait obéissant en tout.

Celui qui se fait obéissant est digne de confiance et on peut lui donner tout pouvoir.

C'est ainsi que notre Dieu agit: en ceci moi, Pierre, je cherche de te donner l'exemple, de t'ouvrir le chemin déjà tracé par le Seigneur Jésus.

ANDRE (de la pauvreté) "... mais qu'est-ce que c'est cela pour tant de monde?" (Jean 6,9)

Je suis habitué à calculer. Je savais calculer combien de corbeilles de poissons il fallait vendre pour vivre une semaine.

Il était facile de calculer que pour une foule de centaines et de milliers de personnes cinq pains d'orge et deux poissons ne suffisaient pas. Je n'ai pas eu peur de communiquer mes conclusions au MaÎtre.

Lui cependant n'a pas fait attention à ce que je lui disais. Il m'a laissé à mes calculs et il a continué imperturbable sur un autre chemin, sans calculs.

Alors j’ai appris.

La leçon du MaÎtre m'a aidé à compter, à calculer sur la présence et sur l'amour du Père. d je me souviens d'avoir un Père, tel que mon Seigneur me l'a fait connaître et rencontrer, alors je suis tranquille. Quand je me souviens que mon Père est le créateur de l'univers, je n'ai plus peur ni de la faim, ni de la soif, ni du futur, ni de la parcimonie 1a plus extrême.

Et lorsque je me souviens que mon Père est notre Père à nous, alors je n'ai plus peur des hommes. Et lorsque je me souviens que le Père voit et entend, alors j'aimerais d'être pauvre, encore, plus pauvre, pour lui permettre de se montrer papa, d'exercer sa paternité dans ma vie.

En vivant avec Jésus et nous étions nombreux et aucun de nous avait un travail rétribué par les hommes en vivant avec lui j'ai appris à fa-ire les comptes autrement. J'ai appris que un plus un ne fait pas deux mais cent! Oui, parce qu'avec Jésus à un plus un il faut ajouter le Père. Voilà le secret! Un secret qui se complète ainsi: un plus un pour donner et non pas un plus un pour prendre. Depuis ce jour-là lorsque j’ai vu lei cinq pains devant cinq mille bouches, je ne me plains plus. Alors je me suis plaint avec Jésus de la pauvreté. A présent je ne peux plus me plaindre. Et même je désire la pauvreté pour pouvoir encore voir les miracles de Dieu.

Je me suis aperçu que dans la pauvreté nous, les hommes, sommes aidés davantage à confier en Dieu, à voir le visage du Père, à être attentif à ses délicatesses. Dans la pauvreté, notre foi grandit et, avec la' foi, notre capacité de communion et d'être frères, les uns pour les autres.

J'ai de la compassion pour les riches qui ne peuvent pas expérimenter la grâce et la beauté de cette vie.

Pour moi, habitué à gagner mon pain en trimant sur les filets de pêche, habitué à pouvoir dire: j’ai travaillé, j’ai gagné, je ne dépends de personne, pour moi élevé ainsi il a été dur de changer de mentalité. Avec le MaÎtre il n'y avait plus de temps pour travailler, pour travailler de façon à percevoir une rétribution. Avec le Maître, je prévoyais la misère. Mais après tant d'années, me voici encore vivant. Et même, si. j'y pense bien, il ne m'a jamais rien manqué.

Le MaÎtre aussi a quitté son travail de menuisier et il a expérimenté que le Père, qui nourrit. les oiseaux du ciel et habille les fleurs, a une réserve de pain et de tissu pour les fils qui travaillent dans son Royaume.

Le Père n'envoie personne au travail sans lui promettre ce dont il a besoin. Mais ses ouvriers devront s'occuper seulement du Royaume, seulement de son Roy

Tout le nécessaire pour leur vie et leur travail, ils le trouveront tout pt. Ils devront peiner seulement pour son Royaume. Oh, que de peine! De la peine pour rester dans la paix, de la peine à détourner le regard de soi pour l'orienter à lui et jouir de lui, de la peine pour rester fils, de la peine pour donner aux autres les paroles et les sourires de Dieu. Mais tout cela est oublié lorsqu'on voit le Père penché sur ta pauvreté afin que rien ne te manque de nécessaire et parfois même de superflu.

Bienheureux les pauvres, je me souviens d'avoir entendu dire par le Maître. Oui, bienheureux les pauvres car ils peuvent voir la main du Père qui s'ouvre à eux. Bienheureux ceux qui, choisissant Jésus, n'ont plus de souci pour eux, ne s'occupent pas de ce monde qui croit d'exister lorsqu'il est riche; c'est le moment oÙ le monde s'éloigne de Dieu et se perd dans une mer faite de rien.

Bienheureux celui qui, pour aimer Jésus, pour avoir seulement lui dans son cœur, distribue ce qu'il possède, se détache de tout, devient pauvre.

Moi, André, qui me suis plaint de la pauvreté, je peux te le dire: laisse toutes tes perles, ne risque pas que quelques-unes occupent de la place dans ton cœur. Que tout ton cœur soit pour Jésus! Cela vaut la chandelle! Il n'y a pas de richesse plus grande car alors tu pourras voir près de toi le Père.

 

 

JACQUES (de la pauvreté dans l'esprit)

"Dis-nous quand cela arrivera". (Marc 13,3)

Vous me connaissez sous le surnom sonore de Boanerge (fils du tonnerre) et ne l'oubliez pas car je l'ai bien mérité à cause de mon désir instinctif' de dominer les autres. Un désir héréditaire, c'est vrai, mais qui a augmenté par la force de ma violence. Je croyais que dans le monde des hommes il fallait exercer la loi des poissons: les plus gros mangent les plus petits. Je voulais être un gros poisson et je voulais me maintenir à la surface; c'est pour cela que je faisais la grosse voix.

Le Maître me supportait, il ne disait rien mais son exemple était bien différent. J'étais tenté de croire que cette façon de faire, silencieuse, ce fait de se taire toujours, était le signe d'une timidité ou d'un manque de personnalité et par contre je me suis aperçu que c'était seulement de l'amour. Lui n'était pas timide, il ne manquait pas de personnalité. Au contraire. Il se servait justement de sa force pour aimer d'une manière qu'avec lui nous nous trouvions à notre aise, pour permettre que notre personnalité à nous puisse grandir, se développer, se manifester.

Au bout de quelques années et après maintes expériences personnelles et d'autrui, je me suis aperçu que le fait d'être le fils du tonnerre était une manifestation de superficialité. J'étais très superficiel, je faisais attention aux apparences et c'est pour cela que le bruit ne me déplaisait pas. Quand j'ai commencé à avoir l'intuition de la présence et de l'action du Saint Esprit, alors seulement j'ai commencé à vivre en une profondeur différente, nouvelle, inhabituelle. Je ne sais pas ce que les gens qui m'avaient connu auparavant, pouvaient penser de moi. Certes, j'avais changé. Mais j'en remercie le Seigneur: un changement semblable je le souhaite et le désire pour tout le monde. Une vie nouvelle s'est présentée à moi. Je ne sais pas comment l'appeler: vie intérieure peut-être, ou vie divine, ou vie spirituelle

C'est peut-être l'entrée au Royaume de Dieu car à ce niveau de vie ni les goûts ni les désirs du monde l'emportent mais l'amour du Père pour tous. Oui, c'est vraiment la porte du Royaume des cieux.

J'étais vraiment très superficiel. En y pensant bien j'en rougis presque. Ma curiosité aussi était une manifestation de superficialité. En effet j'étais curieux. Avec mon frère et les deux fils de Jonas, moi aussi j'ai eu le courage de demander au Maître des choses qu'il n'était pas nécessaire de demander. Mais j'étais superficiel, je me contentais et cherchais l'apparence de la réalité. Je lui ai demandé en quelle occasion ou en quelle année certains évènements. auraient dÛ arriver. C'était une demande de curiosité. Je voulais savoir pour savoir, je voulais connaître les secrets de Dieu pour le seul goût de les connaître ou, peut-être, je ne sais pas ce qui était en moi: était-ce le désir d'être plus renseigné que les autres, d'être renseigné le premier de façon que je puisse dire ensuite: "je le savais déjà »!

C'était de la curiosité qui me fourvoyait de mon devoir, de l'attention mon Seigneur. Ma vie est en lui, cachée en lui: je devais l'apprendre. Je n'ai pas besoin de savoir quand arrivera un fait important, mais il m'est utile par contre de rester immergé dans l'amour du Père, cramponné à Jésus.

Même pas les anges connaissent le futur, pas même Jésus, le Maître, s'en soucis. Et moi, son disciple, je ne veux pas non plus me prélasser dans des rêveries et dans la recherche de pronostics et de pressentiments. Ce, sont les jeux du Malin.

C'est pour cela que les curieux restent toujours loin de la réalité, toujours en dehors du cœur de Dieu. Il ne l'ouvre pas à ceux qui s'approchent de lui pour savoir, il l'ouvre à ceux qui s'approchent de lui pour s'offrir, pour se rendre disponibles, pour l'aimer. C'est à eux que le Père ouvre son cœur et manifeste ses secrets sans même qu'ils les lui demandent, sans qu'ils s'en aperçoivent. Dieu n'ouvre pas son cœur à ceux qui veulent l'étudier et se vanter pour ce qu'ils ont vu dans sa lumière. Le Père devient un cœur transparent pour celui qui s'y plonge avec amour: et ceci arrive aux petits, aux humbles, à ceux qui se contentent. C'est notre Maître qui nous l'a dit un jour et je l'ai moi-même expérimenté.

Lorsque je cherche de comprendre Dieu, je m'éloigne de lui. Lorsque je désire l'aimer et disparaître en lui, alors je le comprends. Comme elle est merveilleuse et étrange la façon de faire de Dieu! Elle est sage Bienheureuse la pauvreté dans l'esprit. L'esprit humble et pauvre, qui n'est pas en quête de grandeurs, qui ne cherche pas de tout savoir et de savoir tout de suite, c'est l'esprit bienheureux. Il est dans les conditions idéales pour recevoir la lumière du Royaume.

Bienheureux est celui qui s'approche du Seigneur et de ses créatures avec de la reconnaissance et non pas avec de la curiosité.

La curiosité à l'égard des choses de Dieu ou de ses créatures empêche de voir Dieu. J'ai appris à me contenter de ce que Jésus-même me dit: cela est utile et nécessaire pour que ma vie devienne la sienne, une manifestation de la sienne ! La curiosité emmène des désirs de vanité ainsi qu'il m'est arrivé juste à moi.

Je voulais savoir d'avance quelle était ma place pour m'en assurer la première. Et j'ai entraîné dans cette étrangeté le plus jeune de mes frères. Jésus a été bon. Il ne m'a pas reproché mais il m'a fait comprendre que ma place doit être la sienne: m'offrir au Père, boire son calice, donner ma vie.

Quand je cherche quelque chose pour moi, soit une place, soit des choses à savoir par curiosité, je ne vis pas une vie divine car je suis égocentrique'. Seulement quand je peux dire: "me voici,, "que ta Parole s'accomplisse en moi", alors ma vie et celle du Fils sont une seule.

Moi Jacques de Zébédée, fils du tonnerre, je suis heureux de te dire que la pauvreté intérieure, se contenter de tout, rester en silence, c'est un grand don qui aide à aimer Jésus.

Ne rien désirer pour soi, c'est un grand gains qui attire sur toi la paix de Dieu et la ressemblance avec lui. 

 

 

CELUI . . . que Jésus aimait

(Jean 13,23)

(de la chasteté)

Je désire que mon nom n'apparaisse pas sur le papier! Seul celui de Jésus en est digne. Et tant que ma personne peut laisser la place à la sienne, je m'en réjoui et en suis honoré. Il semble que ceci est le sens de toute adoration véritable et de tout véritable amour. L'adoration c'est se prosterner pour ne pas créer d'obstacle à la lumière de Dieu, afin que sa présence puisse occuper tout l'espace. Et le que la plus grande liberté et qui donne un véritable amour c'est celui qui donne une entière confiance.

C'est pour cela que de moi je veux dire seulement ce qui peut donner gloire à lui, Jésus. En effet en moi il n'existe de vrai et de bon que ce que Jésus y a mis.

Il m'a aimé. Lui a été tout pour moi: père, mère, frère et ami; il est devenu ma vie.

Je suis vivant et présent dans le Royaume de Dieu pour autant -vraiment beaucoup que Jésus m'a aimé.

Je suis sur que Jésus a donné de l'amour à tout le monde. Il en a donné beaucoup à chacun. Je ne veux cependant pas cacher l'amour qu'il m'a donné- à moi. Je ne veux pas le cacher dans la foule comme si l'on savait qu’ayant aimé tous, il m'a aimé aussi. Non! Son amour était personnel. C'est moi qu'il a aimé. Je jouis encore continuellement en me souvenant de chacun de ses petits gestes d'amour pour moi.

Chaque parole qu'il disait c'était pour moi, chaque miracle qu'il a fait c’était un don pour moi, chacun de ses silences était rempli d'amour pour moi. Chaque regard, chaque pas, chaque fatigue qu'il supportait c'était de l'amour pour moi. Chaque goutte de sang qu'il perdait dans les souffrances les plus incroyables c'était un grand amour pour moi. Combien il m'a aimé, Jésus! Je veux vous le dire pour que vous sachiez combien d'amour il y avait dans son cœur l

Il m'a permis en outre d'être l'un des trois témoins des moments les plus secret: sur le Tabor moi aussi j’ai pu y être et il en a été ainsi chez Jaire et au Gethsémani.

Une préférence de Jésus pour moi? Un privilège? Je l'ai vécu comme un privilège mais dans le cœur de mon Seigneur il ne s'agissait pas d'une préférence mais d'une préparation. Il voulait me préparer aux tâches qu'il m'aurait confié pour ses autres amis et pour les miens aussi. C'était un geste d'amour pour tout le monde! L'amour de Jésus ne demande rien. Il est gratuit.

L'amour gratuit est le plus beau, celui qui attire davantage. C'est pour cela que j'ai choisi moi aussi de vivre son amour, un amour gratuit. J'ai fait cadeau de ma vie à Jésus. J'ai voulu lui faire cadeau de mon passé: je ne le regarde plus, je ne le considère plus à moi. Il y aura eu beaucoup à purifier et il le fait certainement.

Je lui ai' fait cadeau, je lui fais cadeau du présent, de ce moment où je parle avec toi. Ce moment-ci est à lui, c'est pour cela que je suis plus attentif à lui qu'à toi! Je veux lui faire cadeau du futur: tout le futur de ma vie est et sera à lui. Il pourra disposer de mi comme il veut. C'est pour cela que je ne m'engage avec personne, c'est pour cela que je garde mon cœur libre de l'affection d'une femme pour que mon cœur puisse lui appartenir entièrement. Je garde mon cœur libre également de l'affection de parents et amis car mon cœur n'est plus à moi. Peut-être t'en seras-tu aperçu, sinon je te le dis sans crainte de te scandaliser, que moi je ne t'aime pas. Non, je ne veux pas lier mon cœur au tien et je ne permets pas non plus que le tien se lie au mien. Et cela arrive d'une façon étrange car toi tu te sens aimé encore davantage parce qu'on te laisse libre. Moi j'aime Jésus. Ce que je fais c'est en obéissance à lui et c'est pour cela que tu te sens vraiment aimé.

Seulement Jésus est capable de se laisser aimer par moi, par un homme, d'une façon gratuite. Les hommes veulent, d'une façon ou d'une autre, payer chaque geste d'amour qu'ils ont reçus. Quelqu'un le paie avec de l'argent; d'autres avec d'autres gestes d'amour; s si le geste d'amour est accompli pour payer, de quel amour s'agit-il?

Je veux aimer seulement comme Jésus, gratuitement. - C'est pour cela que je peux aimer seulement lui; et recevoir de l'amour seulement de lui s'il voulait m'en donner encore.

Lore tu m'aimes, je remercie avant tout Jésus: c'est de lui que je reçois ton geste d'amour. En effet, si tu sais aimer, ce ne peut être que pour un don venant de lui. Je te remercie aussi, comme on remercie le serviteur qui a obéi à son maître.

L'amour de Jésus, celui qu'il a pour moi et moi pour lui, remplit ma vie. Il la remplit tellement que si je cherchais un autre amour je me sentirais vider.

L'amour de Jésus est si complet et si perfectionnant que celui qui jouit de son amour et lui donne le sien n'a pas besoin d'autres sources d'amour. Il a dit en effet que les fils de Dieu sont pareils aux anges (Lc 20,35).

Le corps et l'âme ne sont plus décisifs; seuls les signes de Dieu le sont, comme pour les anges, car celui qui ne se marie pas s'occupe seulement de plaire au Seigneur.

J'ai choisi la voie de ceux qui se sont faits eunuques pour le Royaume des cieux, de ceux qui ont réservé à Jésus toute leur capacité d'amour.

Les hommes du monde n'apprécient pas ce choix ne connaissant pas Jésus, ni la richesse et la perfection de son amour. Mais c'est moi qui suis chargé de les leur faire connaître à travers cette décision continue, de tous les jours!

Oui, quelqu'un du monde, en voyant mon amour entièrement voué à Jésus, pourra s'apercevoir de quelle force est chargé le Royaume des cieux. Quelqu'un pourra peut-être comprendre que tout l'amour appartient à Dieu et se rappellera que lui aussi est-destiné à plonger en lui.

Moi, cependant, je ne choisis pas Jésus pour que ma vie soit un sermon mais seulement parce que lui, Jésus, m'a aimé et qu'il est digne de recevoir tout l'amour !

Comme celui qui se marie laisse son père et sa mère pour vivre avec son conjoint, moi aussi, ayant donné tout moines à Jésus, j'ai laissé mes vieux amours, ceux qui venaient de la terre et retenaient une partie de mon cœur. Je les ai quittés.

Jésus a été bon. Vraiment je ne méritais pas tant. Il m'a donné la tâche de vivre avec sa Mère. Jésus m'a donné une famille et il m'a donné à une famille, la meilleure qu'il connaissait, la seule dont il pouvait disposer.

De sa Mère il pouvait disposer car elle avait déclaré sa fidélité à Dieu, obéissance à jamais: "Qu'il soit fait de moi selon ta parole!"

Avec sa Mère, j'ai commencé à vivre comme un fils. J'ai entrepris une vie « commune » pour amour de Jésus, avec qui aimait Jésus, en obéissance à Jésus.

Donner tout son cœur à Jésus c'est le début d'une belle et grande aventure. Les surprises qu'il prépare sont une récompense continuelle. Si je l'aime gratuitement, il me le rend d'une façon divine.

Moi, le disciple que Jésus aimait, je t'encourage à aimer seulement Jésus, à choisir Lui seul comme époux. Epouse-le: il en est digne!

 

 

PHILIPPE

(de la contemplation)

« Seigneur, montre-nous le Père et cela nous suffit » (Jean 14,8)

Je suis l'homme des certitudes. Je veux arriver tout de suite à la conclusion, je n'aime pas de rester à penser, à évaluer, à considérer. Du moins j’étais ainsi. Des choses concrètes. C'a été la même chose lorsque Nathanaëlle me manifestait sa perplexité sur Jésus; je lui ai simplement dit: "Viens et vois". J'ai toujours aimé me rendre compte personnellement. Les choses rapportées sont toujours filtrées, elles ne sont pas authentiques. Je croyais ainsi que même Jésus me rapportait des choses filtrées quand il me parlait de son Père. Il en parlait si bien que seulement celui qui l'avait vu pouvait le faire. Mais moi, tout de même, je voulais voir.

Vouloir voir le Père On me l'a bien enseigné ce psaume qui dit: "Je cherche ton visage Seigneur; montre-moi ton visage ! Et moi j’en ai fait ma prière préférée. En se présentant l'occasion, j'ai fait cette demande à Jésus: "Montre-nous le Père". Ç'aurait été suffisant pour moi: je croyais qu'ensuite j’aurais été satisfait; j'aurais atteint le but.

Jésus. avec patience et stupeur s’étonna. "Depuis si longtemps je suis avec vous et tu ne m’as pas encore connu, Philippe?" "Celui qui m'a vu à vu le Père".

Je n'y comprenais plus rien. Mais quoi? Jésus en chair et os ne pouvait pas être le Père! Le Père c'est un esprit, il est dans les cieux, il n'a besoin ni de vêtements ni de pain! Le Père ne souffre ni le froid ni la chaleur! La réponse de Jésus ne me satisfaisait pas. Et cependant si le Maître disait ainsi, ce devait être vrai.

Je l'avais déjà vu le Père, sans le savoir, sans que je m'aperçoive de lui. La réponse de Jésus m'a laissé pensif: comment avais-je pu être aveugle? Et j'ai commencé sans me décourager une nouvelle recherche. En regardant Jésus, je tâchais de voir le Père. Il ne m'est resté que peu de temps, quelques heures, car cette nuit-là il a été livré. Mais j'ai eu l'occasion, par la mémoire, de revenir aux années précédentes, après qu'il m'avait dit: "suis-moi", ce qui avait changé mon existence.

Voici le résultat de mes observations: j'ais vu Jésus accueillir avec délicatesse et attention les enfants! C'était une nouveauté. Un homme cherche l'attention des adultes, de ceux qui peuvent l'honorer et le rendre important. Jésus, lorsqu'il rencontrait des enfants, les regardait avec tendresse. Voilà, j'ai vu alors en lui l'attitude du père: de lui le Prophète a dit: "Je les attirais avec des liens de bonté, avec des liens d'amour: j'étais pour eux comme celui qui soulève à sa joue un petit enfant". En regardant Jésus, j'ai vu le cœur tendre du Père penché sur chacune de ses créatures.

J'avais vu Jésus qui parlait à la foule avec sagesse. Il disait des paroles touchant le fond du cœur, dont on sentait la vérité profonde. Il n'était pas noces re d'avoir fait beaucoup de raisonnements pour se convaincre. Je tais et nous sentions que tout ce qu'il disait était vrai parce qu'il touchait mon expérience, la nôtre. Oui, les paroles de Jésus réalisaient tout ce que Dieu avait annoncé par la bouche de Jérémie.

Je mettrai ma loi dans leur esprit, je l'écrirai sur leur cœur ! Alors je serai leur Dieu et eux mon peuple".

En écoutant Jésus, j'entendais la voix du Père !

J'avais vu Jésus se pencher sur toutes sortes de malades, en avoir compassion, écouter leur cri d'espérance ou en avoir l'intuition avant qu'ils ne le formulent. Et de Jésus sortait une force qui guérissait tout le monde. J'avais vu Jésus mais j’avais observé ainsi de mes yeux la bonté du Père qui « a écouté les paroles de ma bouche » et qui "pénètre dé loin mes pensées" aussi bien qu’il connaît ma parole quand elle n'est pas encore sur ma langue',' comme je prie souvent avec les psaumes. J'avais observé la puissance et la bonté du Père qui bande les blessures et les guérit.

J'avais vu Jésus doux et conciliant avec les pauvres, mais dur et ferme avec les personnes superbes et intransigeantes. Maintenant seulement je me rends compte d'avoir vu en lui l'attitude du Père qui "regarde l'humble mais qui détourne son regard du superbe" (Ps 136,6).

J'avais vu et entendu Jésus donner l'annonce du pardon au paralytique et à l'adultère et je l'avais vu réconcilier le publicain Zachée avec les hommes et avec Dieu. Certainement j'étais en train de voir le Père qui pardonne la faute puisque même si vos péchés sont écarlates, ils deviendront blancs comme la neige". En regardant Jésus j’avais vu le Père!

Mais je l'ai bien mieux vu pendant les jours et les heures de sa passion et de sa mort. Quand je l'ai entendu adresser à Judas, au Gethsémani, le salut "ami" en se laissant embrasser par lui, alors j'ai vu le Père qui ne regarde pas les offenses et qui nourrit l'espoir jusqu'à la fin.

En contemplant Jésus sur la croix, ainsi que Jean me l'a décrit, en proie à la peur et à la déception - je n'avais pas eu le courage d'y aller - je peux contempler l'amour du Père, de ce père qui se donne tout entier pour le salut de ceux qui ne 1 'ont pas aimé, accueilli, obéi.

En regardant Jésus, j'avais vraiment vu le Père.

Le Père des cieux s'est laissé observer par tout le monde en Jésus. Le voile du temple s'est déchiré. Le visage du Père peut maintenant être contemplé par tout le monde. Moi, Philippe, je ne cesse pas de regarder Jésus pour voir le Père. C'est un regard qui donne la joie, qui donne la paix. C'est un regard qui fait naître l'amour et donne la clarté et la force pour connaître mes devoirs de fils et pour avoir la force joyeuse de le! accomplir.

Je sais que la tentation de l'homme, tentation qui me prend souvent, c'est de s'arrêter pour regarder les autres, leurs gestes, leurs actions. Elles sont attrayantes parce qu'elles sont imprégnées de cet égoïsme et de ce que je dis vouloir battre, vaincre. Mais en les regardant, je ne reçois pas la force pour dépasser les difficultés et les tendances de mes faiblesses, de mes tentations. En regardant le mal qu'il y a au monde, je reçois seulement de la tristesse et de l'irritation qui, à la longue, m'entraîne à des attitudes de curiosité, et ensuite de jugement, d'accusation des hommes: "l'accusateur des frères" se trouverait à son aise en moi, tandis qu'il a déjà été précipité. Si je vais en quête du mal, je me retrouverai pauvre et affaibli.

En regardant Jésus, en contemplant en lui le visage du Père, mon cœur reçoit une stimulation à aimer, à jouir, à dépasser avec espérance les angoisses de la création.

Alors mon visage peut donner au monde des rayons de lumière; il peut être le miroir de ce qu'il voit aux cieux. La contemplation de Dieu me donne cette force nouvelle qui sont les véritables nécessités des hommes, de chaque homme. De cette contemplation de Dieu, le monde reçoit l'espérance, des actes d'amour et de compassion, des motifs de paix et de joie.

Moi, le disciple de la curiosité et du concret, je t'exhorte à employer beaucoup de temps à contempler le Père en Jésus. Tu deviendras ainsi un don précieux pour tes frères dans la foi et pour tous les hommes

 

 

BARTHELEMY (de l'enthousiasme)

"Comment me connais-tu?" (Jean 1,48)

Moi, fils de Ptolomée, j'ai reçu un beau nom lorsque j'ai été circoncis, Nathanaël: "don de Dieu". Ma vie, ma présence ici et plus encore le fait d'être parmi ceux qui suivent Jésus, sont un don de Dieu. Tout en étant un véritable israélite, l'un des premiers, qui. ne se sont laissés corrompre ni par de l'or ni par les divinités étrangères, je veux admettre avec reconnaissance que cela est du uniquement à la bonté de Dieu. Je n'ai rien de quoi me vanter. Tout le bien, tout ce qui est beau vient du Père!

Je dois admettre que c'est dans ma simplicité et dans la capacité de m'étonner qu'une caractéristique de mon tempérament a planté les racines: l'enthousiasme! Je m'enthousiasme facilement. Je vois des choses belles, dons de Dieu et je m'enthousiasme. Je rencontre des personnes dans lesquelles la miséricorde et la sagesse de Dieu ont agi et je m'enthousiasme. C'est ainsi que plusieurs m'ont pris pour un type sympathique et ils m'aiment bien. C'est pour cela peut-être que Philippe est venu à moi pour me parler de l'homme de Nazareth, sachant que cette nouvelle m'aurait aussitôt enthousiasmé?

Par contre, je l'ai tout de suite déçu. Je connaissais Nazareth: rien de spécial, comme ses habitants. C'est pour cela que je lui ai ré-pondu froidement par ces phrases devenues célèbres: "Peut-il sortir de Nazareth quelque chose de bon?". Décevoir et être déçu c'est typique des enthousiastes. De même la nature qui nous offre des merveilleuses chaînes de montagnes doit les accompagner d'innombrables vallées.

L'enthousiasme et la dépression sont jumeaux.

Mes enthousiasmes me rendent sympathique. Aussitôt qu'ils me manquent cependant, je deviens antipathique, soucieux, pré e vide. Bien d'expériences m'ont été d'enseignement et de lumière. . Je me suis aperçu que l'enthousiasme ne soutient pas la foi. Il a fallu beaucoup pour que je m'en aperçoive, mais la nuit de ce fameux jeudi, quand avec les autres je me suis enfui moi aussi, je me suis aperçu que ce qui est nécessaire pour soutenir la foi c'est l’amour, un amour qui sache se compromettre, éprouvé silencieux. L'amour fruit de l'enthousiasme ne résiste pas aux difficultés. La foi enthousiaste se laisse étouffer facilement aussitôt qu'elle est demandée et vécue dans les situations concrètes.

Je l'ai appris à mes frais. Après cette nuit-là et ce terrible samedi, muet de terreur, mon caractère a sensiblement changé. L'enthousiasme a cédé la place à la réflexion, à l'intériorisation des faits et des paroles. J'admirais Marie, la mère de Jésus qui appréciait et désirait le silence. Comment avait-elle pu s'approcher de la croix? Comment avait-elle pu garder la paix et cette foi ferme et inébranlable dans une situation plus terrible que la mienne? Elle n'avait jamais été enthousiaste de Jésus ni de ses oeuvres. Quand elle jouissait de lui, c'était en silence tandis que moi je m'enthousiasme pour quelques miracles. Elle fermait les yeux et se recueillait. Elle restait dans la paix. Pas même le Calvaire en a secoué la profondeur. Une attitude celle-ci qu'en une certaine mesure j'ai trouvée en Jean. C'est lui le seul, le plus jeune, qui a eu du courage.

J'ai longtemps réfléchi sur ces choses. Je me suis aperçu que la joie de l'enthousiasme, une joie qui devient tout de suite superficielle, attire l'attention des autres sur moi. Celui qui me voit exulter, enthousiaste pour Jésus, ne regarde plus à lui, mais il est attiré par ma façon d'être. Et c'est en cela que se trouve le mensonge. Et il en est de même pour la dépression et la tristesse qui viennent des déceptions. En ce cas-là aussi les fruits viennent de la même racine: l'attention de ceux qui m'entourent est attirée par moi, comme un aimant polarise tout autour de soi. ce sont les jeux de l'esprit humain. Et me voici alors en proie au mensonge. Le mensonge consiste dans le fait de cacher Dieu. Quand d'une façon quelconque je me mets en évidence moie, en attirant sur moi l'attention des hommes au lieu de les aider à s'orienter sur Dieu, je suis dans le mensonge. C’est ainsi que faisaient les esprits immondes que Jésus faisait taire. Il les faisait taire parce qu'ils proclamaient la vérité avec l'esprit du mensonge: ils attiraient l'admiration sur eux-mêmes au lieu d'obéir et d'adorer Jésus.

Pour faibles qu'ils soient, mon enthousiasme ainsi que mes dépressions ont la tendance à devenir le centre d'attention, à me détourner et à détourner les autres de la contemplation et de l'obéissance à Dieu.

Non sans difficulté mais avec décision et joie je me suis orienté sur le chemin du silence. J'ai commencé ainsi: quand je voyais quelque chose ou quelqu'un qui allait m’enthousiasmer, j'essayais de me demander ce que le Seigneur voulait me dire par cette rencontre. Et quand quelque chose allait me porter à la dépression, je me demandais encore quel était le message de Dieu pour moi.

Il arrivait ainsi et il arrive que je ne m'enferme pas en moi-même, je reste ouvert à l'égard de Dieu. Le Saint-Esprit reste sur moi et me fait continuer dans la sérénité et la confiance et dans l'émerveillement silencieux des façons de faire du Père.

Ma route va s'aplatissant. Quelqu'un me dit que je suis en train de devenir indifférent. Quelqu'un d'autre me dit qu'il me trouve plus réfléchi, presque imperturbable. D'autres me disent d'autres choses encore. Tous disent quelque chose en se basant sur le degré d’expérience de leur vie spirituelle. Celui qui vit dans l'intimité de Jésus, mon seul Seigneur, me sourit silencieusement et de ses yeux il me dit sa compréhension.

Jean le Baptiste avait exhorté à baisser les monts et combler les vallées pour préparer un chemin droit au Seigneur qui venait. A-t-il' senti quelque chose de Semblable à cette expérience à moi? Baisser les montagnes de l'enthousiasme et élever les vallées des dépressions pour que le Seigneur puisse marcher sans difficultés vers nos cœurs s et agir en eux sans en être empêché?

Même si le Baptiste ne le pensait pas c'est moi Barthélemy de Cana de Galilée qui te le dis maintenant après en avoir fait l'expérience.

Maintenant, après ces expériences, je comprends un peu comment il se fait que Jésus m'a connu tout de suite, la première fois qu'il m'a vu sous le figuier.

Maintenant que je l'ai connu, il est devenu pour moi la lumière me fait "connaître" qui je rencontre. Je vois s'ils sont de Dieu ou s'ils ne lui appartiennent pas encore. Je suis un pauvre homme mais, par grâce de Dieu, éclairé par lui.

 

 

MATHIEU (de l'amour aux pécheurs)

"Jésus était à table dans la maison de cet homme" (Marc 11,15)

La première fois, Jésus avait accepté de venir manger chez moi, dans ma maison. Après quelques jours c'est moi qui suis allé toujours avec lui. Il est venu manger chez moi. Je ne m'attendais pas à cela. Celui qui connaît et observe la loi ne va pas chez un receveur d'impôts. Celui-ci est une personne immonde, sa maison est un endroit impur. Pourquoi alors Jésus est-il venu chez moi? Avait-il peut-être une autre loi dans son cœur ? Ou bien moi-même, à partir du moment oÙ j'ai décidé de le suivre, je n'étais plus immonde, et ma maison n'était plus la maison d'un publicain mais celle d'un ami de Dieu? Il me semble que celle-ci soit la meilleure réponse. Jésus est le Saint et celui qui s'approche de lui et l'accueille se retrouve purifié. A mon collègue de Jéricho aussi, Zachée, il est arrivé la même chose. Il a regardé Jésus avec amour entre les feuilles du sycomore et depuis ce moment-là il n'était plus un pécheur, il n'était plus dans les ténèbres car il avait retrouvé le chemin et ouvert les fenêtres du cœur à la lumière. A partir de ce moment-là il était fils de Dieu: pourquoi ne pas entrer chez lui? C'est Jésus la justification et la sanctification. Là où il arrive et où il est accueilli, là la loi s'accomplit et les ténèbres du péché s'en vont. Il peut aller partout.

Le pécheur seulement contamine tout partout où il va à moins qu'il n'aille à Jésus, l'accueille, le garde dans son cœur. Moi aussi depuis que j'aime Jésus je M'aperçois d'être libre, libre d'aller partout sans me contaminer.

Oui, c'est étrange. Si j'aime Jésus, tout me devient possible. Si j'aime Jésus j arrive même à aimer les pécheurs. d tout mon amour est pour 1 'unique fils de Dieu, il me semble que mon cœur respire l'amour et qu'il y en ait vraiment pour tout le monde, même pour ceux qui m'ont fait souffrir. C'est le péché qui m'a fait souffrir; eux en ont été les victimes; ils ont besoin d'être ais. Moi, en aimant Jésus, je deviens un avec lui et je me trouve à comprendre et a vouloir être livré avec lui pour qu'ils rencontrent les bras du Père.

Je me suis aperçu que l'amour pour les pécheurs existe en moi seulement quand j'aime uniquement Jésus.

On dirait que c'est un contresens mais il n'en est pas ainsi: c'est véritablement vrai. Si j'aime quelqu'un d'autre, je deviens défenseur d'hommes contre d'autres hommes. Si j'aime quelqu'un d'autre au lieu de Jésus seul, je commence à diviser les catégories, les classes, les hommes et les femmes, les jeunes et les vieux. Pour avoir de l'amour pour tous je dois vraiment me limiter à aimer seulement le Fils de Dieu.

Lorsque j'aime Jésus seulement, je suis libre: de sympathies et d'antipathies, libre de sens d'infériorité ou de supériorité. Quand j'aime Jésus seulement je me retrouve libre du jugement des autres et clans mon jugement à 1’égard des autres. Quand je juge les autres il arrive souvent que leur péché, véritable ou présumé, a une influence sur mon cœur, sur mon amour, sur ma liberté; je me retrouve dépendant des actions des autres au point de ne pas les aimer ou de me fâcher si ces actions me semblent mauvaises. Le jugement me vient si facilement! Il semble inné en moi. Et en effet il me semble pouvoir dire que c'est justement cela la véritable pomme d'Adam ! Le jugement en effet me vient spontanément parce que je crois pouvoir décider ce qui est le bien et le mal pour les autres et pour moi. Je participe au fait d'avoir mangé à l'arbre de 'la connaissance du bien et du mal: c'est un grand empêchement à l'amour; cela veut dire entrer dans des ténèbres denses, ne comprendre plus rien.

Je peux en sortir seulement en faisant confiance à Jésus: seulement à lui, seulement au Fils cet arbre-là appartient. C'est lui qui connaît ce qui est le bien et le mal pour moi et pour les autres.

Je ne me demanderai plus ce qui est le bien et c’est à lui que je le demanderai! Je ferai pleine confiance à sa parole, sans la juger. De moi il a été écrit: "s'étant levé, il le suivit". En ces mots il y a toute cette aspiration de mon cœur de remettre tout jugement à Jésus puisque lui seul a reçu la tâche de juger. C'est à lui que je veux regarder, penser ce qu'il pense, faire ce qu'il fait.

Je me suis aperçu à plusieurs reprises que seulement lorsque je regarde Jésus j'arrive à aimer les hommes. Je vois en effet que Jésus est venu pour donner l'amour aux pécheurs, il est venu pour leur donner la certitude de la bienveillance du Père. Jésus a un regard de préférence pour ceux qui sont hors du chemin et il jouit comme le berger qui retrouve sa brebis égarée quand il peut rencontrer leurs yeux. J'ai vu la joie de Jésus quand il a pu dire à Zachée: "Descends, je vais venir chez toi ! » Je n'arrive pas à aimer les pécheurs surtout ceux qui ont péché contre moi. Mais si je me souviens de mon Maître alors je peux m'unir à lui pour donner à tous l'amour du Père. L'amour de Jésus pour les pécheurs est un véritable mystère. Il aime celui qui fait le ml parce que cl est une personne à ramener au Père. Et du Père nous savons qu'il ne veut pas la mort du pécheur mais qu'il se convertisse et vive. C'est par Jésus qu'arrive au pécheur l'amour du Père. Plus les ténèbres sont denses plus la lumière est agréablement appréciée. C'est ainsi que je m'explique la beauté et la grandeur de la foi de ceux qui ont été des grands pécheurs.

Le pécheur aussi est appelé à la sainteté. Moi aussi, pécheur et publicain, j'ai été appelé à devenir saint. A l'école de Jésus j'ai appris à voir dans l'homme non pas ce qu'il a fait mais la grandeur à laquelle Dieu l'appelle, l'intention que le Père a sur lui. De telle façon mon cœur reste toujours dans l'amour, reste toujours en Dieu.

Moi, Mathieu Lévi, je ne suis pas digne de te dire ces réalités mais Jésus est digne que ses intentions soient connues. C'est pour cela, même si je suis bien loin de les pratiquer pleinement, que je te les communique et toi, par ton exemple, tu m'aideras à les vivre chaque jour, en renouvelant ainsi l'amour dans le Fils de Dieu qui m'a appelé à lui.

 

 

THOMAS (dé la direction spirituelle)

"Il n'était pas avec eux" (Jean 20,24)

Je n'ai jamais fait une bonne impression et mon nom à été même lié à des proverbes et à des dictons qui me déshonoreront dans les siècles. Mais cela m'importe peu. Je suis content d'être au nombre de ceux qui ont été choisis par Jésus et, à travers tout ce que je dirai je veux t'indiquer un chemin pour te faire l'instrument d'une des manières de-sa présence.

Moi qui ai cru à la résurrection du Seigneur seulement après l'avoir touché, moi qui étais absent à la rencontre de mes frères avec le Seigneur, je veux maintenant parer à cet acte grave de manque de confiance. Je n'avais pas eu confiance en Jésus ne croyant pas qu'il pouvait me communiquer un message à travers mes frères, et je n'ai pas eu confiance en mes frères ne croyant pas que leur joie était vraiment causée par la Insurrection de Jésus. Il a été bon pour moi et à présent je veux lui faire place. Je ne veux pas te convaincre, je veux te faire une proposition. Un jour Jésus nous a dit: "Là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis parmi eux". Je viens te proposer d'être constamment fidèle, d'être l'un de ces deux qui se réunissent dans le nom de Jésus. Cela pourra te coûter beaucoup, cela pourra grandement te peser, mais pense à la beauté et à l’œuvre que Jésus peut accomplir s'il est présente Qu'il ait un lieu concret de présence est plus important que ma liberté et mon autonomie. Jésus, le seul Sauveur de l'homme, présent dans un rapport concret parmi ses disciples !

Toi aussi tu peux être l'un de ces deux qui vivent continuellement unis au nom de Jésus.

Cela arrive certainement déjà de plusieurs façons, quand tu te réuni par exemple avec tes frères pour la prière ou pour quelque célébration. Mais l'unité que tu peux vivre en de telles occasions est très limitée et ne dure pas longtemps. L'unité vécue. par ceux qui sont appelés à vivre en communauté est plus durable et plus profonde. Mais il y a une façon que je veux te proposer, qui que tu sois, possible à tout chrétien, même s'il n'a pas reçu un appel particulier de vie!

Tu peux chercher l'unité avec un disciple de Jésus qui soit pour toi comme un père, un père spirituel. Avec lui ton cœur peut être entièrement ouvert et l'unité dans le nom de Jésus peut atteindre toutes les dimensions de la vie, les plus profondes. L'unité voulue et cherchée pour l'amour de Jésus avec un père spirituel rend véritable et concrète la parole que Jésus a dit et c'est ainsi que sa présence peut assumer des dimensions et des caractères concrets inattendus.

Je m'en suis aperçu par les fruits: des fruits de paix, de joie et d'amour me rendent sûr qu'en cette unité l'Esprit de Jésus est à l’œuvre. L'unité que je peux vivre, l'unité du fils avec le père n'est rien de moins que le miroir de cette unité vécue par Dieu, Fils et Père!

Vivre pleinement cette unité te coûtera, comme à Jésus auquel le fait de vivre en union avec son Père a coûté la mort. Etre uni au Père, qui aime les pécheurs a coûté à Jésus de rester dans l'amour et l'offrande de soi même sur le Calvaire: un aspect de l'unité que nous appelons obéissance et qui a la couleur du reniement de sa propre volonté et de ses propres idées.

Vivre l'unité avec le père spirituel par amour de Jésus c'est vivre l'obéissance et mourir. Mais tu le feras volontiers parce qu'à ce prix Jésus peut réaliser concrètement aujourd'hui sa puissance d'amour. Vivre en union avec le Père spirituel ce n'est pas vivre, avec quelqu'un qui te commande et qui te conduit, mais c'est être uni à quelqu'un qui aime Jésus et qui cherche avec toi son Royaume.

Je l'appellerai Père parce que par son intermédiaire j'offre ma vie au Seigneur. Il sera de son côté mon serviteur et mon frère, mieux encore, serviteur de Jésus t fils de Dieu pour moi. Je chercherai de ne rien faire sans être uni à lui et de faire tout avec son approbation et sa bénédiction; c'est ainsi qu'un lieu est garanti à Jésus: notre relation d'unité.

Le Père des cieux nous verra comme des frères qui marchent ensemble en servant de guide l'un à l'autre: des frères entre lesquels souffle l'Esprit d'amour et, là où est l'Esprit, là est Jésus qui garantit et entreprend son oeuvre.

Ce genre d'unité je peux le vivre et je veux l'offrir à Jésus pas seulement lorsque je suis plein de défauts ou riche de péchés ou dans le pétrin des problèmes. Je veux offrir à Jésus cette possibilité de présence à jamais! Et pas seulement pendant que je suis en formation! D'ailleurs comme disciple' u Seigneur et fils de Dieu, je suis toujours en formation, toujours en classe!

Je te propose un nouveau style de vie, bien sûr. Mais depuis ce jour-là, le huitième de la résurrection, quand je me suis trouvé Jésus vivant et concret devant moi, je ne peux que chercher des personnes qui s'offrent pour lui donner la possibilité d'être encore concrètement à l’œuvre. Je sais que tu l'aimes: allons! Je sais que tu tiens davantage à sa personne qu'a ta personnalités : allons! Précieuse aux yeux du Seigneur est la mort de ses fidèles. Elle est précieuse au Père la mort dans l'ouverture et l'obéissance parce qu'il peut ainsi encore engendrer son Fils, le donner au monde, rendre fructueuse sa présence de Ressuscité. Lui, le Ressuscité, s'est montré présent dans la communauté réunie; forme toi-aussi une communauté unie en son nom au moins avec un de ses disciples: tu lui offres ainsi une nouvelle possibilité d'agir.

Moi, Thomas, je porte un nom qui convient à l'invitation que je t'ai adressée. Je m'appelle Jumeau! Le jumeau n'a pas de vie à lui seul: il grandit avec un autre, il naît avec un autre. Je veux que mon frère jumeau soit Jésus! C'est lui qui m'a indiqué la voie, l'unité avec les siens. Depuis le jour où le fait d'6tre seul a engendré l'incrédulité et que Jésus m'en a libéré, je ne veux plus être-seul, je ne veux plus vivre seul. Ma vie, je veux la lier à un autre ami de Jésus, par son amour! Je ne veux pas te tromper: qu'aucun jour, qu'aucune nuit puisse te trouver seul. Tu pourrais ne pas voir Jésus, ne pas t'apercevoir de lui, ne pas être à lui. Lie ta vie à l’esprit d'un ami de Dieu et tu seras sauvé!

 

 

JACQUES D'ALPHEE (de la parenté)

"Mes frères sont ceux qui écoutent la parole de Dieu " (Lc 8,21)'

On m'a envié parce que je suis "frère du Seigneur". C'est vrai, je suis son parent proche et on peut dire que l'on a grandi ensemble. Moi aussi pour longtemps j'ai considéré une raison d'orgueil le fait d'être l'un de ses parents. Lorsque J'ai reçu, avec les autres, l'Esprit de feu, alors je me suis aperçu de l'inutilité et même du poids de la parenté.

Etre parent de Jésus avait signifié pour moi garder avec lui un lien inactif et stérile; c'était un lien qui m'empêchait de saisir le sens des gestes de Jésus; ils étaient pour moi une raison d'orgueil si les gestes étaient appréciés par le public. ils constituaient pour moi une raison de honte si le public ne les approuvait pas. Le lien de parenté ne me laissait pas libre d'aimer Jésus en tant que Fils de Dieu. Et cela en outre risquait de me faire prendre position envers lui, de façon qu'il n'était pas entièrement libre d'agir comme le Père l'inspirait.

Quand le Feu est descendu sur moi aussi, mon amour pour Jésus s'est purifié; il s'est libéré des empêtrements des liens humains. Ce feu-là a été une véritable libération; alors seulement j’ai senti quelle dimension profonde avait l'unité spirituelle avec le Fils de Dieu, quelle vie nouvelle et véritable c'était par rapport à l'unité de la parenté charnelle. C'est toute autre chose.

Alors j'ai commencé à désirer cette nouvelle unité avec mes autres parents aussi, proches et lointains, avec mes frères, mes oncles et mes nombreux cousins. Je les aimais tous, du moins je croyais les aimer. Et eux ils m'aimaient, ils disaient qu'ils m'aimaient et cherchaient mon bien. En cherchant mon bien, ils arrivaient à détourner mon attention à suivre Jésus. Quand ils sont venus le chercher pour l’emmener avec eux le croyant en phase de dépression psychique, quelle pression 1’on a exercé sur moi verbalement et en d'autres façons!

On communiquait même, de loin, une grande contrainte par leurs pensées critiques, leurs jugements et leurs prétentions. Tous les chemins leur étaient permis pour me priver de ma liberté.

Quelqu'un me disait que Jésus était un exalté, quelqu'un d'autre insistait que je devais bien appuyer les pieds par terre-et que je ne devais pas trop me fier à ce qu'il disait. Certain autre voulait me convaincre que les autres onze avaient été plagiés et que je ne devais pas, moi, courir ce risque-là. On faisait même recours à des stratagèmes affectifs- quand mes parents deviendraient vieux, j'aurais dû m'occuper d'eux et il y avait encore des frères mineurs auxquels j’aurais du pourvoir avec mon travail.

Quelquefois leurs raisonnements semblaient vraiment me convaincre: tu peux faire du bien chez nous aussi, ici, dans ton pays. C'était vrai: je pouvais faire du bien mais faire du bien ce n'est pas suivre Jésus. Suivre Jésus ce n'est pas la même chose que faire du bien. Le païen aussi peut faire du bien ainsi que le Pharisien. Si Jésus me demande de le suivre, c'est cela le bien que Dieu me demande de faire.

Que de luttes intérieures à cause de mes parents! Quelqu'un d'eux a fini par me croire, par m'aimer encore davantage: c'étaient ceux qui avaient commencé à voir Jésus avec d'autres yeux. D'autres ont fini par rompre avec moi; le fait d'être un parent n'a servi que pour m'éliminer de leur groupe. Ce sont ceux qui n'ont maintenu avec Jésus qu'un rapport d'intérêt: "Peut-être un jour nous pourrions avoir besoin de lui pour la santé ou pour le travail".

De toute façon je me suis aperçu qu'avec eux je dois avoir un cœur vigilant. Ils portent. mon attention toujours sur moi-même en me détournant du don de ma vie à Dieu: "Fais attention à ta santé, prends garde de ne pas tomber malade. Mange ceci ou cela: je te le porte si on ne te le donne pas. Ne te fatigue pas! . . ne . . pas; ne . . pas. . . Il me semble devoir leur répondre ce que Jésus même a dit à Simon Pierre lorsque celui-ci ne voulait pas le voir souffrir. "Va-t-en loin de moi, Satan! Tu ne penses pas selon Dieu mais tu as les pensées du monde!"

C'est exactement ainsi dans la plupart des cas. Mes parents voudraient me remplir des pensées du monde; ils voudraient me faire retourner en arrière. Leurs discours sont terrestres, humains, charnels tandis que moi j'ai désormais choisi un autre monde et j'ai donc d'autres perspectives, celles de la vie spirituelle et intérieure. Je cherche le Royaume de Dieu même au prix de ma santé, de ma vie. Que de vigilance!

Je croyais les aimer mes parents. A la Pentecôte je me suis aperçu que l'amour que j'avais pour eux n'était pas de l'amour. c'était seulement un sentiment nature1 ainsi qu'un morceau de mon âme désireuse de bien se porter.

L'amour véritable pour les parents aurait du se manifester en leur donnant ce que j'avais de plus précieux, de plus enrichissant: mon trésor c'est Jésus!

L'amour véritable envers mes parents c'est de leur communiquer Jésus: avec des paroles, sans paroles, avec mon cœur. Voici mon nouvel amour pour eux. Je ne les aime pas en tant que parents, je les aime car je suis à Jésus parce qu'il les aime et qu 'il désire se faire connaître par eux aussi.

L’amour de parenté que j'avais avec Jésus a du disparaître, être brisé pour que je puisse l'aimer avec l'amour du Père et me laisser aimer par lui. L'amour de parenté envers mes parents doit être également brisé pour que je puisse être pleinement possédé par le Saint-Esprit, par l'amour divin qui est spirituel et qui vient enchaîné et conditionné par le sentiment humain que l'on appelle amour.

Cette façon de rompre les liens affectifs tout en semblant cruelle est par contre semblable à la rupture d'une noix. Tu ne peux pas en jouir tant que tu ne la casses pas.

Jusqu'à ce que l'on ne brise pas les liens affectifs on ne peut que partiellement recevoir et donner l'amour véritable, celui de Dieu.

Mon expérience, semblable à celle des autres onze, ne laisse pas de doutes. Moi, Jacques d'Alphée, frère du Seigneur, je veux t'exhorter à donner tout ton cœur à Jésus. Même si tes proches parents veulent t'en empêcher, ne désiste pas. Tu les aimes bien davantage quand tu appartiens entièrement au Seigneur. . Et eux-mêmes quand ils verront que tu es décidé et il s'apercevront qu'il s'agit de ta vie et"non pas de l'engouement d'un moment, ils t'en seront reconnaissants. Il faudra quelques années, le temps de ta fidélité et de la patience de Dieu.

 

 

SIMON LE ZELOTE (de l'amour de Jésus)

"Il parlait du sanctuaire de son corps" (Jean 2,21)

Jésus aussi a employé la parole de laquelle est né mon surnom "le zèle pour ta maison me dévore". Jésus aussi était zélote; il n'était pas comme moi. Moi, je cherchais avec passion une voie politique vers la liberté de ma nation. J'avais plongé dans une série de convictions qui me donnaient du prestige aux yeux des hommes. J'étais ou je croyais être un libérateur.

Jésus m'a appelé moi aussi à le suivre. Au début je pensais et je rêvais la révolution qu'il aurait du organiser et soutenir.

Lentement mais constamment et avec stupeur je me rendais compte que Jésus était différent par rapport à ce que je pensais. Il ne parlait ni de gouvernement ni de politique. Il parlait d'amour à pratiquer en commun et non pas à faire pratiquer. Il parlait de justice à vivre et non pas à prétendre. C'est avec une extrême lenteur que je comprenais en regardant Jésus que les hommes n'ont pas besoin de meilleurs chefs, ils ont besoin de serviteurs. Et les serviteurs ne commandent pas, ils aiment. Jésus était vraiment un serviteur, qui voulait rester à servir et fuyait les hommes qui voulaient l'élever sur le piédestal du pouvoir. d on est venu pour l'enlever et le faire roi, il a disparu. Il connaissait celui qui le voulait à la tête des nations- le Malin.

Oui, Satan lui aurait donné le pouvoir pourvu qu'il l'eut adoré. Commander aux autres, dominer les nations c'est la conséquence de l'adoration de Satan. Les faits le prouvent. Mon zèle pour la politique a pris une nouvelle direction. Auparavant je me battais pour que le temple, c'est-à-dire l'institution juive, fût libre de l'intervention romaine. Je voulais que le temple, c'est-à-dire ma nation organisée autour du temple, fût la seule forme d'autorité pour mes frères de Judée et de Galilée. Maintenant je vois que le seul temple autour duquel il vaut la peine de se serrer c'est la personne de mon MaÎtre, Jésus !

L'institution du Temple, tout en étant l'héritage de nos pères, est encore une forme d'oppression de l'homme: Jésus l'avait fait remarquer ce jour-là quand, ainsi que l'on avait écrit du Messie, il a employé le fouet sur l'esplanade pour en faire sortir les brebis et les bœufs. L'institution du temple était devenue une pierre d'achoppement pour la rencontre de l'homme avec le Père. Elle favorisait la rencontre de l'homme avec un Dieu anonyme, un Dieu transformé en commerçant. Si on lui donnait une colombe il donnait son pardon, si on lui donnait une brebis, il donnait son amitié. C'était un Dieu semblable à celui des païens. Je me rendais compte que même si le temple était devenu libre des tributs il n'aurait pas donné la liberté aux cœurs.

Il y a un nouveau temple pour lequel je dois engager mon zèle. C'est le "Corps" de Jésus. C'est Jésus, véritable homme, le seul lieu où nous rencontrons le Père. C'est lui, sa Personne, le seul lieu de la liberté. C'est avec lui qu'en tout lieu, en tout moment nous nous retrouvons chez nous car c'est lui la demeure du Père.

Moi aussi, ainsi que mes autres frères, j'ai compris cela aussitôt que Jésus a soufflé sur moi son Esprit. Avant c'était un mystère.

Pour beaucoup de monde cela reste un mystère. Une manière dangereuse de penser se répand parmi les personnes qui aiment être intelligentes qui cherchent des subtiles raisonnants. Elles croient que la mission de Jésus soit finie et que tout ce qui reste ce sont de belles idées, des convictions à avoir, des paroles à pratiquer appellent même des théologies. Mais elles oublient que l'homme se sauve dans la rencontre avec la Personne de Jésus: une personne concrète, un homme en chair et os; ce n'est pas un fantôme comme nous en avions eu peur lorsqu'il s'est présenté au milieu de nous portes fermées. Le fils de Zébédée a écrit une lettre pour mettre en garde les croyants des antéchrists qui réduisent l'Evangile à une série de belles idées, en détournant ainsi les cœurs de l'amour pour la Personne de Jésus. Moi je n'ai pas écrit mais quel zèle me dévore pour le seul véritable "temple" qui est son corps. Jésus est présent, il est avec nous tous les jours afin que nous puissions l'aimer. En l'aimant nous aimons le Père et nous entrons dans son intimité.

En aimant la Personne de Jésus nous trouvons le salut de ce monde qui renverse les valeurs, qui détruit l'homme et la société humaine. En aimant la personne de Jésus nous bâtirons à nouveau l'harmonie dans notre cœur, dans notre maison et dans notre société. En aiment la Personne de Jésus les royaumes de ce monde ne font plus peur et ne constituent plus des problèmes.

La mission de Jésus n'est pas terminée; nous, les douze membres de son Corps, nous la continuons.

Seulement quand je reste uni à sa Personne, avec amour, je m'aperçois de continuer sa mission et sa mort dans l'amour. d au contraire je veux convaincre les autres des belles idées que j'ai sur Dieu et sur l'homme, alors Dieu est mort en moi.

Vouloir convaincre c'est déjà dominer. La vie de Dieu ne se communique pas, j'en ai fait l'expérience, avec des convictions mais avec le témoignage. Et le seul témoignage qui donne la vie divine, c'est l'amour pour Jésus.

Moi, Simon surnommé le Zélote, je veux te donner une perle: aimer Jésus. Il est c trésor caché dans le champ! C'est la vie éternelle, qui reste en dépassant toute expérience, tout évènement terrestre, qui rajeunit au fur et à mesure que les années passent. Aimer la Personne de Jésus. Quand j’aime Jésus, Dieu n'est pas loin, il est dans mon cœur ! Et aucune chose, aucune personne n'est plus nécessaire.

 

 

JUDAS DE JACQUES (de l'identité de Dieu et de l'homme)

"Construisez votre édifice

spirituel sur votre sainte foi" (Gd 20)

J'ai appris à ne me vanter de rien. Je me vantais de mon nom: c'était le plus convoité et le plus beau car c'était le nom du père de la tribu chanceuse et bénite. Et c'est juste mon nom qui a été effacé par le traditeur de l'homme et de l'humanité. Maintenant je me vante seulement du nom de Jésus. De ce nom j'en suis fier. C'est celui qui m'unit à Dieu, c'est le nom qui garde mes yeux levés au ciel, c'est le nom qui remplit mon cœur d'espérance et d'amour. Le nom de Jésus est le Nom lié à jamais au Père des cieux. C'est le seul Nom qui remplace celui triple des Pères pour identifier le Dieu véritable, celui qui aime les hommes et qui entre dans leur vie.

Nous connaissions et distinguions le Dieu véritable et éternel sous le nom du Père d'Abraham, d'Isaac et de Jacob;le Dieu qui par leur foi obéissante était entré dans notre sang, dans notre histoire. Le Dieu unique, nous le connaissions par la triple obéissance d'amour de ces trois pères: maintenant nous ne le connaissons plus ainsi mais par son Fils unique, Jésus. L'identité de Dieu, de l'unique, véritable et saint Dieu nous est donnée par Jésus.

Si les hommes veulent s'en passer ou ignorent ce nom, ils n'arrivent pas à connaître Dieu. C'est pour cela que je veux mettre en garde les chrétiens: facilement ils s'approprient du langage des hommes du monde, succombant à la tentation de vouloir être accueillis dans le monde, qui parlent de Dieu sans l'identifier. En regardant à Dieu sans une identité concrète, historique, incarnée dans l'humanité, ils voient facilement un Dieu fait d'idées, éloigné, avec des caractéristiques déformables ou transformables selon les différentes cultures et les différents conditionnements des habitudes sociales et morales. Le Dieu des philosophes est un Dieu sans visage, sans mains; il en est ainsi du Dieu de ces théologiens qui regardent plus aux hommes qu'à Dieu. Et ce Dieu devient ainsi l'épouvantail ou bien un Dieu qui justifie tout, qui n'est plus capable de demander des changements de vie, des programmes, qui n'est plus capable d'appeler!

Regardons, mes frères, seulement à Dieu, Père de Jésus! Connaissons Dieu seulement en aimant et en partageant la vie de Jésus: alors nous le découvrirons vivant, capable de nous parler et de nous demander des choix radicaux, capable de nous demander la pauvreté, le sacrifice, le service pour l'humanité.

Si nous connaissons Dieu par le Nom de Jésus, nous le trouverons Père: pas un Dieu dans nos mains, mais un Dieu capable de garder dans ses mains notre vie.

Le nom de Jésus est le seul nom important. Il doit être gardé dans notre cœur, dans nos yeux, sur nos lèvres.

C'est le Nom qui sauve de l'égocentrisme et de la confusion, qui sauve de l'idolâtrie et de la superstition, qui sauve de la vanité et de l'orgueil.

Je me suis aperçu que le Nom de Jésus c'est le Nom qui ne manifeste pas seulement la véritable identité de Dieu ; il manifeste aussi la véritable identité de l'homme, mon identité.

Sans le Nom de Jésus, je suis simplement "homme", une créature de Dieu bien sur mais à la merci des forces supérieures, un homme perdant, effrayé. Avec le Nom de Jésus je ne suis plus seulement homme, mais fils; avec le nom de Jésus l'on met en évidence une réalité éternelle, celle que je possède aux yeux de Dieu: je suis aimé par lui, j'ai un Père, je suis lieu de l'amour de Dieu.

Si je m'appelle "homme" il reste en évidence la mort, la fin. Si je m'appelle fils c'est l'amour, l'éternité qui vient à la lumière.

Si je m'appelle homme il y a l'ombre de mon péché et du péché de la société. Si je. m'appelle fils, c'est la splendeur du pardon qui se montre.

Le Nom de Jésus est indispensable; sans lui je connais seulement la matière, la fin, la peur, la mort; je ne me connais pas. Avec le Nom de Jésus je connais mon rapport avec Dieu. Je sais ce que je suis: une créature aimée par Dieu.

Avec le Nom de Jésus entre moi et Dieu, cela ne fait rien si je suis petit, insignifiant et m@me pécheur parce que je sais à qui j’appartiens, en quelles mains ma vie est placée. Et ce sont ces mains-là qui donne la véritable valeur. Quelle valeur peut avoir un stylo en or dans la main d'un enfant qui joue par rapport au crayon en bois dans la main d'un artiste? Ce sont les mains qui la possèdent qui la rendent précieuse.

Avec le Nom de Jésus je sais à qui j'appartiens, je connais ma véritable identité. Voilà pourquoi je te recommande de ne pas oublier dans le "sous-entendu" le Nom de Jésus: tu risquerais d'oublier et de rendre vaine ta vie et la vie de ton Dieu et d'entrer dans une véritable confusion où tout est aplati et égal: les religions égales, les comportements égaux, les choix indifférents etc. etc. Tu ne distinguerais plus les tentations de Satan des inspirations du Saint-Esprit, les réactions humaines des propositions divines.

Moi, Judas de Jacques, je remercie Dieu pour le Nom qui m'a été révélé: le Nom nouveau qui possède ma vie, le Nom de Jésus. Le nom de mon Père Jacques ne dit plus rien de ma vie. Si tu veux me connaître, appelles-moi Judas de Jésus !

 

 

MATHIAS (du témoignage)

« Qu’il devienne avec nous témoin de sa résurrection » (Actes 1,22)

J'avais vécu près de 1ui avec les douze, depuis le commencement, depuis même qu'il avait été baptisé par Jean et cependant Jésus ne m'a jamais appelé. Ce sont les mystères de Dieu, les desseins de son imperscrutable sagesse.

Maintenant moi aussi je suis appelé parmi les douze. La façon par laque' j'ai été choisi c'est un problème secondaire; ce qui importe c'est que le Seigneur m'a choisi. Il s'est servi des hommes, de leur simplicité et de leur foi. Et puisque Jésus leur avait donné le pouvoir de lier et de délier, j'ai été lié à la mission des onze par l'intermédiaire de leur appel. Et me voici apôtre et témoin pour vous de la résurrection de Jésus.

Je me suis demandé souvent le sens de mon devoir: être le témoin de la résurrection du Seigneur, c'est le sens de ma vie. Je ne crois pas en avoir épuisé la découverte mais tout ce que j'ai compris par intuition, même si ce n'est pas complet, je te le communique.

Tant que j'étais témoin de la mort de Jésus j'étais triste, j'avais peur, j'étais soucieux du jugement des chefs et je craignais leur visage. J'étai déçu, convaincu d'avoir échoué, d'avoir été plagié. Ma mort je la voyais imminente, terrible, sans signification. Le monde avec sa réalité me dominait; ma vie était un signe que la force du mal avait vaincu. Dieu n'avait plus rien à dire, je ne l'interrogeais pas comme s'il était vraiment mort.

Maintenant je sais que Jésus est ressuscité et je veux en être son témoin; voilà mon devoir: être confiant, content. Lui il est vivant d'une vie plus pleine et pour cela je suis content de la souffrance de sa mort car je sais de donner à nouveau à sa gloire une occasion de se manifester. Il est pénible d'être joyeux dans les souffrances; quand la douleur ou l'angoisse entraîne. Mon attention sur moi-même et je vois l'ombre de la mort, alors l'effort de jouir pour la vie de Jésus est grand. Le témoignage c'est un véritable martyr. Je suis le dernier arrivé et déjà je m'en aperçois. Il me semble que le fait de témoigner Jésus ressuscité c'est déjà se mettre hors des idées normales du monde, hors du sens commun, hors des intérêts cultivés par les hommes.

Depuis que j'ai voulu commencer ce témoignage, je me suis trouvé hors du monde. On l'a dit « Tu t'es enfui du monde. Les choses de ce monde ne te font plus réagir; les faits et les évènements desquels la foule s'intéresse, certains de la place, certains du cirque, ne t'intéressent plus. Tu t'es réfugié dans un confortable enclos, renfermé dans des convictions formant une barrière. »

On dirait que mes accusateurs ont deviné. Quelques mots cependant ne reflètent pas mon expérience. Je ne suis pas enfui du monde, j'ai été appelé et délivré des poids par mes accusateurs ils s'empresseraient à payer n'importe quel prix à condition d'en être 'constamment enrichis. J'ai été appelé et placé encore dans le monde en tant que signe d'une autre possibilité de vivre une vie différente issant à des faits plus grands et plus durables que ceux de la chronique quotidienne.

J'ai été appelé à la tâche de réagir à ce fait d'une portée universelle qui est la résurrection de Jésus.

Réagir à la résurrection de Jésus cela veut dire jouir, cela veut dire adorer, cela veut dire se taire! Réagir à la résurrection de Jésus cela veut dire aimer les hommes d'un amour différent, d'un amour qui ne touche pas seulement leurs dimensions terrestres mais celles éternelles; un amour qui donne à l'homme la connaissance du Père pour qu'il sache d'être fils pour toujours et qu'il apprenne avec patience à vivre en tant que fils chaque jour. Je suis en ce monde comme témoin d'un autre monde. Voilà ma croix, voilà ma joie.

Ce semble une fuite c'est par contre une découverte. Ceux qui semblent des enclos, ce sont des bras ouverts pour accueillir, un don pour ceux qui sont déçus par le vieux monde.

Le vieux monde, qui voudrait me posséder, présente des trésors rouillés: il voudrait que je les apprécie et que je ne dise pas que ces sont des ordures.

Je suis content et je suis fier de pouvoir dire à tout le monde que la seule personne vivante à jamais c'est Jésus, que la seule parole qui retentira intacte dans les siècles c'est la sienne, que le seul capable de donner la joie, la paix et la véritable fraternité c'est, toujours, Jésus.

Et pour finir, je te donne la nouvelle personnelle: quand tu iras seulement à Jésus et tu lui donneras la plénitude de l'amour et de l'obéissance, alors tu seras heureux, tu jouiras d'une paix totale et tu réussiras à donner de l'amour à tout le monde; tu seras l'une des mains de Dieu qui caresse les hommes du monde entier.

Moi, Mathias, apôtre de Jésus pour la gloire de Dieu, je t'invite à écouter le Seigneur quand il t'appelle par la voix de ses autres disciples. Il fera sortir ton cœur du monde terrestre et tu entreras dans le monde de Dieu. Alors tu vivras comme témoin de l'Invisible et ta vie aura le sens et le goût de l'éternité.

 

 

PAUL (voir Jésus)

"Je n'ai pas jugé devoir savoir parmi vous autre chose que Jésus Christ" (I Cor 2,2)

Je ne suis pas du nombre des douze malgré que vous m'appeliez apôtre.

Et je le suis en réalité: le dernier, le moindre ainsi que mon nom le dit.

Et puisque vous m'en réservez l'honneur avec Pierre, qui a commencé ces pages, je veux collaborer en les achevant.

J'ai rencontré Jésus. Je ne l'ai pas rencontré ainsi que les douze en Galilée pendant son apostolat. Je l'ai rencontré hors de la Palestine, d'une autre façon. Mais c'est lui que j'ai rencontré! Il s'est mis devant moi. Il m'a saisi de son regard et de sa voix et il m'a appelé. Ceux qui me connaissaient ne me reconnurent plus.

Il m'a envoyé pour que je sois confirmé dans sa rencontre avec lui et pour qu'un autre disciple, craintif mais capable de prier, la continue. Celui-ci m'a aidé à connaître Jésus que j'avais rencontré sur mon chemin et il a accueilli en son Nom le don de ma vie. Il m'a donné en outre des paroles et des indications de la part de Jésus.

J'ai rencontré Jésus. -Et depuis lors je ne cesse pas de chercher' es personnes pour leur révéler ce Nom qui est l'unique salut.

Quelqu'un me dit qu'en rencontrant les personnes je rencontre Jésus, que Jésus est dans les frères, dans les frères chrétiens et dans les frères païens, dans les frères opprimés et dans les frères pauvres. Mais si je me mets en cette optique je ne reconnais plus ce Jésus qui m'a rencontré sur la route de Damas. Si en chaque homme je vois Jésus je perds la langue, je n'ai plus le courage de lui annoncer son salut.

Si en chaque homme je vois Jésus, quel Jésus vois-je? Un Jésus qui me demande seulement un verre d'eau ou l'aum6ne d'un sourire ou d'une journée de peine. Ce Jésus que j'ai rencontré ce jour-là, par contre, il m'a demandé toute ma vie, un changement radical, un saut dans la foi. Jésus je l'ai rencontré dans sa personne et non pas en celle d'autrui.

Et alors aujourd'hui ne venez pas me dire ces choses-là qui mitigent la vie chrétienne, la rendent stérile, sans fruit; qui rendent les communautés chrétiennes paresseuses et sans élan, sans vocations à une vie entièrement offerte au Royaume de Dieu.

Jésus je le rencontre avant de rencontrer les frères. Dans les frères je vois des personnes aimées par Jésus, par ce Jésus qui m'a saisi, qui m'a aveuglé, qui m'a guéri.

Dans les frères je vois des personnes que Jésus, celui que j'ai rencontré tout seul tandis que les autres ne s'en rendaient pas compte, veut sauver.

Dans les frères, je vois le désir et la soif de connaître le Fils de Dieu, le désir inexprimé et souvent inconscient de devenir fils de Dieu, frère de Jésus !

Quand je rencontre Jésus dans sa Personne, alors j'ai le courage et la joie de donner aux frères sa sagesse, son Nom, sa lumière. Il y a un "d'abord" qui ne peut pas être sous-entendu. D'abord Jésus seul, tête-à-tête.

Qu'en dirait Pierre? Il m'a confié un de ses secrets: Jésus lui a demandé trois fois- "M'aimes-tu?" Et Pierre, d'étonnement en étonnement s'apercevait que Jésus ne lui demandait pas s'il avait compris, s'il avait appris, s'il avait étudié ses cours, que Jésus ne lui demandait pas s'il aimait « ses brebis » et « ses agneaux » mais s'il aimait lui seul.

C'est ainsi que Pierre même s'est convaincu que pour paître les agneaux de Jésus il devait aimer seulement Jésus.

Pour nourrir, conduire et garder les brebis de Jésus, il devait aimer la personne de Jésus.

Je me trouve en parfaite syntonie avec les déductions de Pierre.

Moi-même d'ailleurs où croyez-vous que j'ai pris la force de supporter les insultes et la prison, les lynchages et les naufrages, les voyages et les fatigues? Je ne la recevais pas des hommes mais seulement de Jésus que je rencontrais et que je rencontre tête-à-tête. Dans ses yeux je vois l'amour du Père pour tous les hommes et alors personne ne m'arrête plus parce que je l'aime.

Rien ne m'arrête plus ou me fait peur parce qu'il m'aime. Ce ne sont pas les hommes qui m'attirent, c'est Jésus qui m'envoie.

Jésus c'est vraiment l'homme dans le corps duquel habite la plénitude de la divinité. Si je l'ai dans mon cœur, les hommes qui me rencontrent peuvent rencontrer sa parole, son amour, son salut.

J'ai été appelé et envoyé pour porter le Nom de Jésus. Je veux le porter à tout le monde et à toi aussi: le voilà; prends-le; adore-le dans ton cœur; murmure-le avec tes lèvres; plie, tes genoux et laisse-toi transformer. Soyez un, toi et Jésus.

Moi, Paul de Tarse, je n'ai rien d'autre à te dire; moi aussi, ce n'est, plus moi qui vis, d'est Jésus qui vit en moi.

 

 

MARIE (de l'Eglise)

"Ce qu'il vous dira, faites-le" (Jean 2,5

J'ai toujours cru mon devoir et mon amour c'était de me taire, de réfléchir dans le silence sur ce que je voyais et entendais. C'est ainsi qu'avec le silence et avec l'amour j'ai pu distinguer lu conduite de Dieu et sa présence paternelle en toute situation.

Vous aussi, faites ce que mon Fils vous dira.

Moi aussi je l'ai fait et tous ceux qui l'ont fait ont été heureux. C'est lui, jésus, la véritable Parole de Dieu. Obéissez-lui et vous serez sauvés.

Moi, j'ai été choisie pour être votre Mère. Je m'en réjouis et j'en souffre; j'en souffre comme pour les douleurs de 1 'accouchement jusqu 1 i quand vous ne serez pas nés à Dieu. Je me réjouis de vous voir unis à la vie de mon Fils comme membres de son Corps, participant à sa mission.

Je suis votre Mère: je vous porte tous dans mon cœur mais je vous vois nés seulement quand je vous vois unis à mon Fils unique. Alors seulement ma tâche envers vous est terminée. Je vous suis encore, toujours, avec amour, mais avec détachement; ainsi que pour Jésus, pour vous aussi je deviens "femme": quand vous êtes unis à lui je veux que votre cœur entier soit seulement à lui. Si vous me contemplez encore et vous m'appelez bienheureuse, vous me verrez avec les yeux adressés sur le Fils de Dieu et vous aussi avec moi vous le regarderez.

Si vous êtes capables de tenir les yeux fixés sur lui, alors vous étés "un", vous êtes une famille, vous êtes Eglise, Eglise sainte, Eglise mère. Vous aussi vous pourrez souffrir et jouir. Vous souffrirez les uns pour les autres jusqu'à ce que, en vos frères, n'ait pas grandi le Fils de façon telle à occuper tout leur cœur, et vous jouirez parce que vous participerez au fait de donner la vie de Dieu, la vie éternelle, aux hommes! Vous serez l'Eglise, la Sainte Mère, la Mère de Sainteté.

Vous verrez en moi votre modèle de l'Eglise Mère; vous aussi vous direz aux hommes: Faites ce qu'il vous dira. Vous verrez en moi une aide, un soutien, une consolation. Et puis cela, vous aussi, Eglise sainte, vous écouterez et méditerez avec amour, dans un silence continu, tout ce que le Père a fait, tout ce que Jésus a vécu.

Sans amour et sans silence, vous, l'Eglise, vous ne serez pas Mère: c'est du fait de parler beaucoup que naît le vent, c'est du silence que naît le Fils de Dieu. Je suis bienheureuse parce que j'ai caché dans le silence le mystère de Dieu, mais on m'a transformée et maintenant tout mon être crie -en silence- avec joie le nom qui vous fait vivre: Jésus!