ME
NU

Mais Jesus gardait le silence

MAIS JESUS GARDAIT LE SILENCE

« Ils regarderont vers Celui qu'ils ont transpercé » (Jean 19,37)

La passion de Jésus n’est pas seulement le moment culminant de son amour, mais c'est aussi le moment où il se manifeste comme de contradiction !

Sa vie, en ce moment surtout, est lumière pour la vie de l'homme. Quelques jaillissements de lumière dans nos ténèbres nous font entrevoir des péchés pour lesquels nous devons nous humilier et des dons pour lesquels nous devons jouir.

 

 

1.

Mathieu 26,5: "Mais ils disaient: pas pendant la fête pour qu'il n'y ait pas de tumultes parmi le peuple". Ils cherchaient le bien du peuple. Dans leur cœur une décision était déjà prise".

Il doit mourir! On la réalisera le plus proprement possible. Aucune possibilité de tout remettre en discussion: cela porterait de graves conséquences, celle surtout de modifier leur cœur.

Comment peut-on arriver à ce point ? On n'a pas interrogé Dieu, le Père. Le Père n'a pas été consulté.

Personne n'y a pensé ou bien on l'a oublié exprès. On le sait bien, le Père fait les intérêts de tous, au détriment des « nôtres ». Ne le dérangeons donc pas. Ce serait agir contre notre propre intérêt.

Me mettre à l'écoute de Dieu ce serait admettre qu'on pourrait avoir, peut-être, une autre attitude, qu'on pourrait trouver une autre solution du problème: ce serait admettre un déficit de notre intelligence. Je sais, où du moins, je crois savoir assez bien où est le bien et où est le mal. L'homme n'a-t-il pas mangé du fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal? Il peut donc se passer de Dieu. Je s m'arranger tout seul.

C'est de cette conviction de l'homme, de cette conviction à moi, que naissent les plus grosses... injustices. L'homme qui connaît, où croit connaître, le bien et le mal, parcourt son chemin en entravant celui de ses frères, en leur posant des obstacles jusqu'à les mettre en croix.

Et il le fait sans même que personne s'en aperçoive. Il sait qu'il fait "le bien". Mais ce n'est pas de l'obéissance au Père. Si on n'a pas consulté explicitement le Père, et pas un Dieu quelconque, ce bien que tu penses ou que tu fais c'est peut-être du calcul, c'est peut-être de l'égoïsme camouflé, c'est peut-être de la diplomatie.

Je t'écouterai, mon Père, j'écouterai aux portes de ton cœur qui aime et veut sauver. Je trouverai de nouvelles attitudes, de nouvelles paroles, je trouverai le véritable bien durable pour le peuple en te donnant mon obéissance.

 

2. Mathieu 26,12 « En versant ce parfum sur mon corps, elle l'a fait en prévision de ma sépulture. »

Jésus interprète bien un fait mal interprété par tous les autres. Une femme avait rompu un vase en alabastre en versant un capital d'huile parfumée. Du gaspillage selon eux, un acte prophétique selon Jésus.

Et je vois cela avec stupeur: je sens moi aussi la force de l'opinion publique et de la mentalité courante qui attribue une grande valeur à l'argent en vue d'un service aux pauvres, pour contribuer à, l'élimination de la pauvreté. Mais je vois pour l'amour de Jésus, n'économise

Le fait de concevoir l'argent en vue de soulager les pauvres ou de les enrichir peut entraîner le danger de penser ou de faire penser que le salut de l'homme consiste à lutter contre la pauvreté. Et alors je tomberais dans une erreur et je tromperais les pauvres mêmes !

Pour eux aussi le seul salut c'est Jésus; pour eux aussi le seul nom par lequel ils sont et il seront "sauvés" c'est celui du Fils de Dieu!

C'est pourquoi je vois avec sympathie les richesses "gaspillées" pour Jésus. Elles ne sont pas gaspillées d'ailleurs, elles servent au contraire à mettre en évidence la seule Vérité et Réalité stable pour l'homme. Alors elles atteignent la destination finale pour lesquelles elles ont été créées: "en vue de Lui" dit St Jean. Elles sont alors finalement libérées: "La création en effet nourrit l'espérance d'être elle aussi affranchie de l'esclavage de la corruption pour entrer dans la liberté de la gloire des fils de Dieu" (Rom. 8,21).

Le parfum de Marie, qu'elle avait acheté comme instrument du péché, pour attirer, des hommes chez elle, pour devenir le centre de l'attention, pour, faire tourner, vers elle les regards et les pas d'hommes avides de plaisir, se trouve enfin libéré de cet esclavage. A présent, renversé sur le corps de Jésus, il attirera les hommes à Lui. Le vase est rompu, tout le parfum versé. Marie exprime ainsi une décision profonde: jamais plus je me mettrai au centre de l'attention, je n'attirerai plus les hommes cherchant de moi le plaisir. Je ne diviserai plus l'amour de mon cœur avec les pécheurs. Je me laisserai attirer seulement par la pureté du cœur de Jésus, le seul auquel tous nous devons regarder pour avoir le salut. Les pauvres seront aidés davantage si on les aidera à s'approcher de Jésus plutôt que de bien les habiller pour deux semaines ou de les nourrir pour trois jours. Avec Jésus, en s'apercevant de Lui, leur cœur aussi pourra s'ouvrir et jouir du pardon et de la véritable amitié.

Et Jésus comprend que le geste de Marie manifeste une prophétie. C'est un geste qui lui rappelle ce qu'Il avait dit Lui-même: "lorsque je serai élevé sur la terre j'attirerai tous à moi".

Ce parfum commence déjà à attirer; L'heure est venue, c'est l'heure de la croix.

 

3.

Mathieu 26,14: "L'un des douze, appelé Judas Iscariote, alla trouver les grands prêtres". Il est à la recherche. Jésus ne lui suffit pas. L'amitié de Jésus ne le comble pas. Il s'est pourtant fié de lui, il lui a confié une charge au bénéfice des autres onze: l'administration des biens du groupe.

Les hommes aussi en font autant. Ils voient un mécontent, ils se fient de lui, ils le comblent de charges, ils le déplacent, ils tâchent de le contenter.. Le mécontentement ne diminue pas. C'est une maladie du cœur ; Un cœur jamais content c'est un cœur égoïste. C'est pour lui qu'il cherche mais rien ne le satisfait, rien ne le comble. Rien ne le rassasiera. Le cœur égoïste est sans fond.

La seule chose qui rassasie l'homme c'est le don de soi-même. Celui qui donne soi-même son temps et ses fatigues, celui-ci comblera son cœur jusqu'à le faire déborder de joie. Mais la tendance de l'homme c'est souvent de chercher pour soi. Et S'il trouve Jésus il le suit pour avoir, pour recevoir. Il veut recevoir des consolations, il veut éprouver des enthousiasmes, il veut trouver la possibilité de se réaliser, il veut la joie et la commodité et pourquoi pas? Les honneurs. Il veut être estimé par les gens, conne Jésus est estimé, mais sans passer par le refus de tous. Et si en suivant Jésus il ne trouve pas tout cela... il en accusera Jésus même et ses autres disciples. Il va rapporter, il va médire, il va murmurer. Il va trouver les autorités, il va chercher. Il porte partout la tristesse de son visage, le témoignage de son égocentrisme. Presque comme Judas. Il était préoccupé pour soi: "combien voulez-vous me donner?".

En suivant Jésus il n'était pas mort à soi-même, il n'avait pas renoncé à sa propre vie, il ne s'était pas préparé à la perdre, à la laisser tomber par terre conne la semence destinée à porter des fruits. Il ne suivait pas Jésus pour partager sa tâche d'offrir la vie à l'amour du Père pour le salut des hommes. 'Celui qui suit Jésus mais qui n'est pas content de Lui et de Lui seulement, celui-ci sera un titre de Jésus. Si Jésus ne te suffit pas et que tu ne le cherches pas pour l'aider dans sa tâche, tu porteras seulement le témoignage d'un cœur vide et ta vie sera stérile dans le Royaume de Dieu, même si tu auras pu faire des choses si importantes qu'elles méritent des monuments sur les places.

 

4. Matthieu 26,27: "Buvez-en tous, car c'est mon sang de l'alliance, versé pour beaucoup en rémission des péchés".

Alliance, c'est un mot qui rappelle des engagements de la vie.

As-tu des alliés? Et tes alliés sont-ils puissants? Alors tu as de la chance car tes ennemis doivent tenir compte non seulement de tes forces, mais des leurs aussi. Mais toi aussi tu dois tenir compte des faiblesses de tes alliés et de leurs nécessités. Ta vie et la leur sont liées en un sort commun. Entre toi et eux il y a une unité de vie, comme un seul sang. Lorsque mon allié est Dieu, toutes les chances sont à moi. Aucun ennemi, ne pourra m'écraser; j'ai un allié puissant, j'ai un allié prêt et sage. Je peux toujours me fier de Lui.

Ses préoccupations pour ses créatures sont grandes. Et je dois faire attention à ne pas m'embarquer en des affaires qui ne lui conviennent pas, sinon je me retrouve avec mes forces seulement. Il est l'allié de tous, je ne peux donc me mettre contre personne: je resterais sans son appui. Il a beaucoup d'ennemis mais personne ne peut le toucher, c'est pourquoi ils se jètent sur moi et s'ils me trouvent loin de Lui ils auront la victoire. Il sait qu'il ne peut rien prétendre de moi: que je sois son allié, cela ne lui sert à rien. C'est pourquoi il ne me demande rien pour stipuler son alliance. Le sang employé pour signer l'accord c'est celui de son Fils.

Je me retrouve toujours vainqueur mais je n'y suis pour rien. Même mes péchés, mes ennemis les plus intimes, qui sont arrivés au point de blesser la volonté, la mémoire, les affections et l'intelligence, même ces ennemis sont éloignés et vaincus par mon allié, Dieu. Il les bat avec le sang de Jésus. Il me suffit de le boire. De le faire entrer en moi. C'est le sang de l'Alliance: le sang qui devient la vie en moi. Ce sang en moi c'est la seule chose valable, l'unique réalité durable, la seule source de vie dans ma vie. Ce sang en moi c'est la raison qui attire le regard vigilant de Dieu et la voie par laquelle Il fait entrer ses richesses dans ma vie: car il ne supporte pas que ses alliés soient vides, pauvres, misérables,… c'est pourquoi il me remplit de ses richesses, de son grand amour, de son Esprit, de sa Volonté de salut, de sa sympathie envers tous les fils des hommes et toutes les créatures.

"Buvez-en tous!". J'en boirai moi-aussi, chaque jour.

 

5. Matthieu 26,43: « Etant revenu, il les trouva endormis ».

Jésus n'a rien contre le sommeil en soi, ni même contre un sommeil tranquille pendant que le monde semble s'écrouler. N'a-t-il pas tranquillement dormi sur le bateau qui allait naufrager? Il y à toutefois des moments dans la vie où le sommeil des autres accentue énormément notre propre solitude. Jésus désirait fréquemment rester seul, c'était pour pouvoir jouir de l'intimité avec le Père. Mais cette nuit-là où il sent que la trahison va s'abattre sur lui, il cherche de la compagnie; non pas une compagnie de consolation ou de compréhension, mais une aide à sa propre prière, presque un soutien à ses bras, comme il en fut pour Moïse sur la colline tandis que Josué combattait.

Les siens dorment. Jésus est vraiment seul à porter le poids de ce qui advient dans la nuit. Ainsi la nuit pénètre l'âme de Jésus et recouvre de son obscurité toute pensée et toute affection.

Seul son esprit conserve la lumière de l'amour.

Cette solitude nocturne de Jésus c'est un héritage que reçoivent ceux qui lui appartiennent et qui ont le don de participer à sa tâche dans le monde.

Tu as trouvé des personnes, des amis qui sont toujours auprès de toi et qui t'apprécient. Mais lorsque l'épreuve de la nuit s'abat sur toi, ne cherche pas l'appui des hommes même des plus fidèles et bons. Ils dorment. Ils ne s'aperçoivent pas de ta nuit. Pour eux la nuit c'est une grâce pour leur repos. Il y a des moments dans la vie du disciple de Jésus où il peut compter seulement sur la Lumière qu'il ne voit pas, sur la Force qu'il ne sent pas, sur l'Amour dont il ne jouit pas.

Ce sont des moments où il faut recourir à l'expérience du désert, des moments où tu cueilles le fruit de ton habitude à rester en tête-à-tête avec Dieu, à t'être contenté de sa présence. Alors, même si tu ne la sens plus, tu s qu'elle ne peut être loin.

Les moments de la douleur et des larmes te mûrissent en cette solitude. Apprends à ne pas confier et à ne pas t’appuyer sur les amis.

Tu devras les laisser dormir pendant que tu te bats contre les puissances ennemies et que tu gagnes pour eux aussi.

 

6.

Matthieu 26,52 "Remets le glaive dans le fourreau".

Il est difficile de prévoir les conséquences de nos propres actions. Surtout les conséquences à longue échéance et les spirituelles. En général nous regardons aux conséquences immédiates et à celles qui frappent le corps. Pierre voulait défendre et se défendre. Cela ne semble défendu à personne, au contraire. Chacun de nous a le devoir sacro-saint de défendre sa propre vie.

Alors pourquoi cet ordre de remettre le glaive dans le fourreau?

Jésus voit ce que Pierre ne réussissait pas encore à observer. Jésus voit s'approcher de Pierre des ennemis spirituels si grands qu'on ne peut les battre avec l'épée, au contraire, ils sont attirés par l'épée. Et Jésus voit également les conséquences de ce geste projetées dans les siècles et dans l'éternité. Les disciples de ce nouveau Maître unique, qui enseigne des choses qu'aucun autre Maître aurait pensé d'enseigner, ces disciples devaient apprendre à aimer les ennemis, à les aimer! Le premier signe d'amour c'est de les rencontrer désarmés. Cette épée qui rentre dans le fourreau avant d'avoir vaincu et avant d'avoir perdu, c'est une leçon pratique que les chrétiens ne se sont pas laissés échapper et ne se laisseront pas échapper.

Se défendre? Pourquoi? Si pour Jésus l'heure est arrivée de la preuve d'amour la plus grande, cette heure arrivera pour eux aussi. Je me défends lorsque j'oublie d'être un membre vivant du Corps de Christ. Son corps est écrasé et défiguré parce que Lui, Jésus, veut affaiblir la chaîne du mal, il veut battre le mal par le bien. Si je l'oublie, j’essaie de me défendre : et la porte s'ouvre à une foule d'autres ennemis plus dangereux car ils touchent le cœur et lui enlèvent la ressemblance à Dieu, le Dieu de l'Amour.

En me défendant, je manque de confiance en Dieu le Père. Si cela faisait part de ses projets, il me défendrait Lui-même. Plusieurs Légions d'Anges sont prêtes à lui obéir! En me défendant je laisse place à un esprit de jugement ou de condamnation et peut-être même de haine, et qui sait? De revanche et de vengeance contre celui qui semble mon ennemi.

En me défendant je suis amené à considérer les hommes des ennemis tandis que le seul ennemi de l'homme c'est celui qui sépare son cœur du Cœur du Père. L'épée ne peut rien contre cet ennemi: la seule force c'est l'amour. Et la force la plus grande de l'amour peut se dégager justement lorsqu'on me blesse, dans le corps ou dans l'honneur. Remets l'épée dans le fourreau, car elle ferme la porte du cœur et tu ne peux plus être fils, elle t'empêche d'aimer. PlutÔt, comme dit St Paul, prends l'épée de l'Esprit, qui est la Parole de Dieu: celle-ci t'illuminera pour rester dans l'amour même lorsque autour de toi se déchaîne la haine.

 

7. Matthieu 26,63: "'Mais Jésus gardait le silence"

J'ai le don de la parole. C'est-à-dire que je sais me faire comprendre de différentes façons. La langue fait des mouvements et, ce faisant, elle fait ressortir de la vie d'autres mouvements qui rendent le langage vif et pittoresque de façon à faire revivre les expériences du passé, les craintes et les espoirs du futur. Avec les mots voilà sortir en les accompagnant comme des petits pages qui attirent sur soi les yeux et l'attention, craintes et jugements, rages et stupeur bonté et miséricorde, doutes et ironies, foi et incrédulité, haines et sympathies. J'ai le don de la parole. Mais ce n'est pas un don libre: je l'ai lié à plusieurs esprits, bons et mauvais, qui s'agitent dans le cœur et attendent de pouvoir se communiquer aux autres. Ils attendent que les mots sortent. Ce n'est pas pour rien que quelqu'un a écrit que la langue tue plus que l'épée et St. Jacques encore aujourd'hui nous rappelle que la langue est un poison mortel, et Jésus dit que chaque mot reçoit une récompense ou un châtiment.

J'ai le don de la parole. Je voudrais que ce soit un don libre. Un don qui exprime seulement la liberté et laisse libre celui qui le reçoit. Ceci pourra-t-il arriver un jour? Rien n'est impossible à Dieu !

Jésus sait parler. C'est Lui la Parole. Il est la seule Parole prononcée avec un effet, Parole prononcée par le Père sur le monde et retournée librement au Père. Jésus est la Parole.

Mais Jésus se taisait! Les mots prononcés par la langue de Jésus sont seulement l'instrument pour faire ressortir de son cœur les sentiments d'amour que le Père y a mis, et ceux de miséricorde et de pardon, ceux de patience et d'humilité. Mais si devant Lui il n'y a pas un cœur prêt à les recevoir, Jésus se tait. A quoi bon parler? Si le cœur de Caïphe est déjà plein de sentiments et ne veut pas s'en défaire, les mots de Jésus ne seraient qu'un gaspillage du don de Dieu; comme si on versait de l'eau sur la route, comme si on jetait la semence sur les pierres ou parmi les épines. Jésus se tait. Mais son silence n'était pas le silence de Dieu! Il restait malgré toute la Parole d'amour, de douceur et de force. La force qui triomphe sur l'amour propre, qui triomphe sur la haine et la bloque, qui refuse la vengeance, la force qui garde au cœur l'amour du Père envers les homes même quand toutes les puissances voudraient l'arracher des entrailles.

J'ai le don de la parole. Je garderai le silence, je me tairai: lorsque tu me demande de parler, Jésus, je dirai ce que tu voudras dire.

Je garde le silence afin que tu déverses en moi tes sentiments avec ta présence.

Et les mots de mes lèvres manifesteront Toi seulement.

 

8. Matthieu 26,72: "Je ne connais pas cet home".

C'était vrai. Pierre ne connaissait pas cet homme.

Tout en mentant, Pierre a dit une grande vérité. Il ne connaissait pas encore Jésus. Oui, il le connaissait superficiellement, il l'avait vu, touché, entendu, même aimé. Mais il n'était pas encore entré dans son cœur. Pierre était resté au dehors, en se contemplant soi-même et en se préoccupant de son propre sort: c'étai donc juste ce qu'il avait dit; cela cadrait. Pierre ne connaissait pas Jésus.

Pour connaître Jésus il aurait dû changer ses yeux, il aurait dû se servir des yeux du Père. Il se servait encore des yeux de chair, qui voient seulement ce qui sert à se défendre, à chercher l'honneur des hommes, à rester loin de la douleur. Par conséquent il avait vu encore trop peu de Jésus, presque rien. Il ne l'avait pas encore vu comme fils de son Dieu. S'il l'avait vu ainsi il n'aurait pas eu peur d'en partager le sort, comme fit le larron pendu à sa droite. Si Pierre l'avait connu comme Fils de Dieu, il aurait désirer suivre ses traces, parcourir les étapes de son chemin, prendre part aux mêmes expériences.

Connaître Jésus, c'est un changement de soi-même, de sa propre vie. C'est laisser entrer son cœur dans le nôtre, c'est vivre son rapport d'obéissance au Père, c'est remettre sa propre cause à "Celui qui juge avec justice", c'est se laisser conduire par Lui, comme les brebis par le berger. Pierre l'a appris et l'a écrit aux chrétiens. Cette nuit terrible, lui vraiment ne connaissait pas Jésus. Il ne lui appartenait pas encore: il se considérait maître de sa propre vie, il ne l'avait pas encor- abandonnée à la protection et à la sagesse du Père. Il se fiait encore de soi et ne pouvait donc pas Connaître le Fils. La connaissance vient en participant à la même mission, en partageant la même obéissance.

Je peux commencer à connaître le Fils lorsque je décide d'être un fils pour le même Père! Jusqu'à ce moment-là je dois dire de ne pas le connaître. Il ne me suffit pas de savoir ce qu'il a dit et ce qu'il a fait, et même pas de l'estimer, et de l'aimer parce qu'il m'aime et me garde avec lui et me donne de l'autorité. Je commence à le connaître lorsque je souffre sa solitude, lorsque je partage son désir de salut pour les pécheurs, lorsque je dis au Père: "ta volonté soit faite, non la mienne", lorsque je bois quelque peu de son calice amer. Alors je commence à le connaître et, je n'aurai plus peur de le dire: ce ne sera même plus le cas de le dire car tous pourront le voir comme on voit une ville édifiée sur la montagne. Tu ne peux la cacher même devant la violence des attaques ennemies.

 

9.

Matthieu 27,11: « C’est toi le roi des Juifs? »

Qui sait ce que Pilate aurait fait d'une réponse éventuelle de jésus ! Qu'il lui est dit oui ou non, cela n'aurait rien changé au sort de Jésus ni au cœur du gouverneur. Cependant cette demande peut rappeler à Jésus beaucoup de souvenirs. Un jour les Juifs le cherchaient, ils voulaient le proclamer roi. Il n'avait pas voulu, autrement... Un jour une femme lui avait demandé une place pour ses fils, à sa droite et à sa gauche. Un autre jour quelqu'un lui avait proposé tous les royaumes du monde. Le mot "roi" avait déjà résonné aux oreilles de Jésus, mais il comportait toujours un sens de supériorité, de domination sur les autres, d'adoration de Satan, d'usage de la violence, de la force. Ce n'était pas des attitudes convenant au Fils qui voulait rester le Fils du Père de tous.

Cette expression se chargeait, de ce fait, d'un caractère de crainte et de comparaison, rappelait l'odeur du sang des rebelles et de la poussière que les adulateurs, qui s'inclinent, respirent à terre.

Jésus n'a jamais pensé à rendre esclave l'homme, mais il est venu pour le rendre libre.

Il n'a jamais cherché d'être roi. Mais il n'a d'autre part jamais refusé que quelqu'un veuille vivre selon sa sagesse, il n'a jamais éloigné quelqu'un qui voulait lui obéir conne on obéit à un roi. !

Il ne s'impose pas comme roi, mais l'homme peut choisir de le servir conne un roi. C'est pourquoi Jésus répond simplement à Pilate: "Tu le dis".

La mesure de la royauté de Jésus pour Pilate, il la donnait lui-même.

Le mot qui sortait de la bouche de Pilate, s'il venait du cœur, était vrai, et lui alors -. gouverneur et politique - il lui aurait obéi.

D'autres paroles aussi subissent le même sort. Quelques chrétiens, et moi aussi d'ailleurs, proclamons: Tu es mon berger! Mais alors pourquoi me plaindre s'il me conduit par des chemins pénibles? Je dis: Tu es mon pain. Mais alors pourquoi chercher ma nourriture dans les paroles des hommes aussi? Je dis: Jésus est le Sauveur. Pourquoi alors tâcher de me défendre? Je dis Tu es la lumière. Pourquoi alors ne pas demander, à lui seulement, sa façon de voir les choses? Je dis: Tu es l'amour. Pourquoi alors je voudrais quelquefois qu'il soit violent avec quelqu'un qui me fait souffrir Je dis: Tu es la voie. Pourquoi alors rester aux bords du chemin et regarder ce qui est autour presque avec regret' Je dis: Tu es mon roi. C'est moi qui le dis. Il me dit seulement qu'il est, mon serviteur et mon ami. C'est moi qui dis: Tu es mon roi. Prémices: je veux t'obéir, je veux rechercher tes ordres. Compte sur moi pour ton oeuvre. Tu es roi. je le dis.

 

10.

Matthieu 27,17: « Qui voulez-vous que je relâche: Barabbas ou Jésus?"

Lorsque nous avons des doutes, nous posons des questions! Bien, c'est un signe d'humilité. Mais c'est une sottise que d'interroger des personnes mal à propos. Elles pourront ensuite nous obliger à faire ce qu'elles veulent et nous savons que ce n'est pas sage. Ce qui est arrivé à Pilate arrive encore et nous en sommes protagonistes.

Qu'a fait Pilate? Il savait qu'ils avaient porté Jésus devant son tribunal parce qu'ils en étaient envieux. On sait bien que lorsque l'envie possède le cœur, ce cœur est aveuglé. Si j'interroge ce cœur, c'est l'envie qui me répond. Pilate a fait la bêtise d'interroger des cœurs envieux, désormais loin de la liberté de jugement et de la sagesse du bon sens. La réponse de l'envie ne laisse aucune liberté: elle deviendra contrainte et chantage. Pilate a été obligé de céder à la force que l'envie à déchaînée Formelle s'est aperçue qu'elle était si importante qu'on l'interrogeait.

La sottise de Pilate, malheureusement, fait encore aujourd'hui des victimes. Il n'y a pas longtemps, moi, qui suis prêtre, je considérais importantes les enquêtes publiées par des journaux ou revues plus ou moins compétents. Les enquêtes étaient effectuées parmi les hommes quelconques, sans aucune distinction; La demande était: Comment voulez-vous le prêtre? Que voulez-vous qu'il fasse? Certains des interviewés étaient à l'écoute du Seigneur, mais la plupart était à l'écoute… du propre égoïsme et des propres passions. Les réponses étaient en conséquence. Ma sottise d'interroger quiconque me rendait esclave et attentif à des réponses qui ne venaient pas de mon Dieu. Les conséquences portaient loin de Lui. La sottise à moi, prêtre, c'est une sottise qui se communique également à beaucoup de chrétiens qui, pour leur comportement, interrogent l'opinion publique, se laissent orienter par les vagues idéologies des partis ou des économistes, qui écoutent et obéissent à la façon d'agir de ceux qui manœuvrent les revues et la télévision, de ceux qui ont l'argent et autres genres d'idoles. Ces chrétiens se retrouvent, après quelque ter si loin de la sagesse de Dieu que leur voix se mêlent aux voix qui crient: Barabbas !

Des groupes entiers de jeunes, grâce à cette sottise, ont remplacé les patronages par les discothèques; dans les cinémas des paroisses on voit des films de violence et de sexe, dans les églises les messes ultra brèves, dans la prédication une langueur tiède, dans la maison des chrétiens toutes les chaînes de télévision et toute sorte de revues athées, dans les rapports sociaux les évasions, dans les vacances des chrétiennes dépenses absurdes pour des fils de Dieu, dans leur travail une avidité insatiable, dans leurs dimanches les distractions qui éloignent toujours plus du Père. Il est temps de retourner à la sagesse d'interroger non pas la foule, mais seul l'Esprit qui vient d'en haut. Alors notre voix s'entendra clairement et aura la lumière de Jésus.

 

11.

Matthieu 27,24: "Il se lava les mains »

Il ne trouvait aucune autre issue. S'il voulait sauver sa peau désormais Pilate devait laisser faire. Il s'en lava les mains. C'était ce qu'ils attendaient: pouvoir faire de Jésus ce qu'ils voulaient, le rendre odieux à tous en le mettant entre les hommes à éliminer.

Il se lava les mains. Comme pour dire: Faites mais je n'y suis pour rien en cela seulement laissez-moi tranquille. Il savait bien que Jésus ne méritait ni la mort ni la flagellation. Il savait, et il en était convaincu, que Jésus méritait toute autre chose. En se lavant les mains avec de l'eau, il dut se les retrouver pleines de sang. Certes il n'était pas responsable de la méchanceté de ce peuple hurlant, mais il s'est rendu responsable du fait que cette méchanceté a pu avoir un pouvoir sur Jésus.

Les Pilâtes d'aujourd'hui continuent à se laver les mains. Mais ensuite elles ne sont pas propres! L'esprit de Pilate est présent pour tenter tous ceux qui ont des responsabilité envers les autres. Non seulement au gouvernement des nations mais aussi dans les bureaux des différentes petites ou grosses bureaucraties, dans les milieux du travail, dans les salles d’hôtel, dans les écoles dans les hôpitaux, sur les routes: partout il y a des gens qui s'en lave les mains. Signe qu'elles sont sales.

Même dans les familles on pratique cette méthode: des parents qui se lavent les mains de la destruction de leurs fils.

Sommes-nous dans un monde propre puisque tous se lavent les mains? Je crois vraiment qu'il est nécessaire de mener à bonne fin nos responsabilités, nos tâches. Notre vie n'est pas un temps libre. C'est toujours un temps occupé par la tâche qu Dieu a confié à chacun de nous. Si en face des hommes nous pouvons (?) nous laver les mains, nous ne pouvons certainement pas le faire devant. Dieu: Il ne nous dispense pas d'aimer avec son amour, d'écouter et d'obéir à son Fils, de vivre sagement et d'éclairer les frères qui trébuchent dans les ténèbres.

Des différentes tâches que Dieu m'a confiées et qu'il me confiera, c'est à Dieu seul que je rendrai compte, c'est de Lui seul que je recevrai ma récompense. Je ne me laisserai pas distraire par les clameurs de la foule agitée. Je veux sauver Jésus: Je ne veux pas le faire disparaître de ma vie seulement parce que beaucoup de monde crie que l'on ne peut vivre de la foi, qu'il faut avoir les pieds par terre, qu'on ne peut obéir à l'Evangile ainsi qu'il est écrit parce qu'il exagère… Je veux sauver Jésus. Ils crieront contre moi mais peu m'importe. La véritable vie ne peut pas mourir.

 

12.

Matthieu 27,29:

"Ils tressèrent une couronne d'épines, ils la lui posèrent sur la tête et lui mirent un roseau dans la main droite".

Désormais Jésus est la risée du moment. Les soldats sont payés pour exécuter les ordres. L'ennui de l'habitude doit être vaincu par la gaieté et celle-ci peut être obtenue aux frais de celui qui doit mourir, de celui qui ne se vengera pas, de celui que personne désormais secourra.. Et voilà Se déchaîner la fantaisie Une couronne et un sceptre, des hommages au souverain: une couronne qui blesse; un roseau qui frappe, des hommages qui déchirent le cœur. Mais l'homme qui a vendu sa propre responsabilité s'amuse.

Dans nos cœurs grandit la compassion pour l'homme torturé et malmené, devenu la risée des soldats. Mais Il est encore le plus éveillé et le plus présent. Il est encore attentif à ces cœurs qui l'entourent. Ils agissent cruellement mais ils sont à plaindre. Il n'y a plus de trace d'humanité en eux. Leurs yeux expriment le vide intérieur. Ils n'ont pas vendu seulement leurs énergies à l'empereur ou à son représentant, ils ont largement ouvert les portes de leur cœur à tout "esprit de l'air" qui agit librement en eux. Y a-t-il en l'air l'esprit d'amusement et de risée'? Rions et amusons-nous. Y a-t-il l'esprit d'ironie? Soyons ironiques. Y a-t-il l'esprit de blague? Blaguons. Y a-t-il l'esprit de sévérité? Soyons sévères. Y a-t-il l’esprit de désordre et de morbidité sexuelle? Les drapeaux flottent selon la direction du vent. Les esprits de l'air dominent l'atmosphère. Le seul homme libre et fort qui en triomphe et qui ne se laisse pas déplacer par eux ni pour les suivre ni pour leur résister c'est Jésus. C'est en le regardant que je vois la véritable liberté. Son cœur reste tourné vers le Père, libre d'aimer, si bien qu'à ceux qui pleureront pour Lui il dira: Ne pleurez pas pour moi mais pour vous-même ! L'homme, même s'il est vivant et sain, est un pauvre homme à plaindre comme s'il était mort si dans son cœur ce sont les esprits de l'air qui dominent, si dans son cœur la Vie ne vit pas. Si l'homme a la Vie en soi, rien ne peut le déplacer. Il peut devenir la risée du peuple, il peut être bafoué et calomnié, frappé à mort, blessé dans son honneur par les mauvaises langues: il sait voir ceux qui se manifestent en ennemis comme des personnes pauvres, qui ont besoin de tout, d'un grand amour, très grand afin de pouvoir les éveiller de la torpeur qui les rend irresponsables, vides, en proie de tout esprit flottant, esclaves de ceux qui crient plus fort. Celui qui a la Vie de Jésus en soi n'a plus rien à craindre car il peut tenir en main la situation spirituelle même lorsqu'elle est, par raillerie, couronnée d'épines.

 

13.

Matthieu, 27,26: « …après avoir fait flagellé Jésus »

Avec un mot dit de façon presque incidente, Matthieu rapporte une décision de Pilate, une fatigue de quelques soldats, une heure de souffrance atroce, pour Jésus. Ses maires qui avaient caressé les enfants, touché les yeux de l'aveugle, relevé la fille de Jaire et distribué du pain à la foule, ces mains sont liées. Son corps, qui avait porté la présence et la puissance du Père, est dépouillé: les soldats peuvent le voir et le toucher comme ils veulent, comme tout autre corps passé entre leurs mains. Il saigne sous les coups de fouet, tout comme les autres.

Le cœur de Jésus: nous voulons voir le cœur de Jésus. Chaque coup de fouet a une répercussion dans son cœur. Chacun de ces coups qui lui arrachent la peau et la chair lui viennent de la force violente de quelques soldats qui ne savaient rien de Lui: ils savaient seulement que c'était un condamné à mort.

Jésus, les yeux fermés, pouvait seulement rappeler à la mémoire, dans les brefs instants entre en coup et l'autre, les paroles de la prophétie: "châtié, frappé par Dieu et humilié". "Tes mains, Père, se servent des mains chargées de haine et d'inconscience de ces hommes payés par l'homme. Je prends ces coups d'eux, mais je les accueille de Toi. Ces coups châtient mon corps: il n'a rien fait de mal mais il a touché le corps des pécheurs, il s'est laissé touché par eux; ces coups humilient mon âme: elle ne s'est jamais séparée de Toi mais elle a eu compassion de l'adultère et du voleur, elle a donné le sourire et la compréhension aux samaritains et aux païens. Ce coup, et le prochain, et cet autre encore, je veux les accueillir conne venus de Toi, Père: tu sais pourquoi! Tu sais quel bien en tirer, Tu sais quel salut en viendra pour ces soldats et pour d'autres fils à Toi.

Tu le sais. Je sais que tu le sais déjà. Je m'abandonne à toi. Il n'y a pas de désillusion pour ceux qui confient en Toi. Je confie en Toi pendant que j'accepte ta volonté, pendant que je bois cette amertume".

Après avoir fait flageller Jésus... Pilate ne savait pas ce qui s'était passé.

Personne ne savait ce qui s'était passé dans le cœur de Jésus.

Personne ne sait ce qui se passe dans le cœur de celui qui est humilié par les hommes. Petit savoir ce qui se passe dans le cœur de celui qui ne t pas, qui ne veut pas se défendre des verges piquantes des hommes? Quel supérieur peut imaginer ce qui se passe dans le cœur humilié, ni écouté ni compris, de l'inférieur?

Pilate ne le sait pas. Toi, Père, tu le sais. Rien ne t'échappe.

 

14.

Matthieu 26,32: "Ils rencontrèrent un homme de Cyrène, appelé Simon, et ils l'obligèrent à se charger de sa croix"

C'est très fatigant de porter sa propre croix sans se plaindre et cela demande toute la foi dont un cœur dispose. Se charger de la croix d'un autre, pour bon et saint qu'il soit, c'est un geste dont on se garde bien. C'est pour cela qu'ils l'obligèrent". Cela doit avoir été dur pour lui. Il passait pour un condamné Si le condamné l'avait demandé lui-même... mais non, les soldats l'obligent par le fait seulement qu'il passe par-là en revenant du travail champêtre.

Quelques jours après Simon sera content et orgueilleux d'avoir porté la croix du Ressuscité, d'avoir aidé le Fils de Dieu. Mais à présent c'est la rage, le mépris et l'envie de vite s'enfuir.

Cela m'est arrivé quelquefois. Cela arrive à tout le monde quelquefois dans la vie d'être appelé malgré soi à une tâche pesante, odieuse, difficile. Tu ne le sais pas qu'elle sera glorieuse et cause de joie, par conséquent tu essaies de te révolter un jour, une semaine, même plus si cela t'est possible. Cependant une main qui te semble celle d'un tyran froid et injuste, comme la main e du soldat, t'oblige et tu ne peux refuser. Après, peut-être longtemps après, tu sauras que cette main était conduite par une sagesse et un Amour qui ne pourrait être plus bon et grand. C'est vraiment comme la main du vigneron qui approche sa lame dure et coupante au sarment pour la taille. A l'époque des fruits on en verra la raison et on pourra louer l'habileté et la décision du vigneron qui, en risquant d'être considéré cruel, a exercé ainsi son amour.

Dieu sait comment Simon de Cyrène a réagi, ce qui est né dans son cœur à la nouvelle que ce condamné était ressuscité! Nous ne le savons pas. Je sais ce qui s'agite dans mon cœur lorsque je me trouve en des situations semblables. Et je s aussi, à présent, que je ne voudrais plus me révolter à rien: parce que je pourrais me révolter à une "constriction" qui me porte le salut. Chaque situation où je me sens "obligé" je peux la vivre dans la confiance et la sérénité: après, trois jours après, ce sera la gloire. C'est pourquoi je jouis à l'avance du fait que "tout concourt au bien de ceux qui aiment Dieu,, comme enseigne St Paul.

Les plus banales petites constrictions venant de contretemps, les grandes constrictions qui semblent venir de la méchanceté de l'homme m’aident seulement à m'abandonner avec confiance à la sagesse et à l'amour du Père. Pour Simon, Il avait prévu la gloire: c'est pourquoi il lui a été permis de porter la croix de Jésus.

 

15.

Matthieu 27,38: « avec lui on crucifia deux larrons, l'un à droite, l'autre à gauche ».

Ils se trouvent à la place de Jacques et de Jean, c'est-à-dire à la place qu'ils voulaient occuper. Mais cela ne leur a pas été accordé. Ce sont les deux larrons qui se trouvent à droite et à gauche de Jésus.

Personne ne les appelle chanceux et cependant ils partagent le sort du Fils de Dieu. Ils ne le mériteraient point puisqu'ils méritent la mort. Ce sont des véritables pécheurs. Ce sont des larrons. Personne ne pleure leur mort, personne ne veut les sauver. Ils ont tous deux de gros poids sur leur conscience, rien ne les différencie. Toutefois, comme ils sont divers! - Tous deux méchants, tous deux avec un passé à faire peur, tous deux sur le point de mourir -. Toutefois quelque chose les différencie énormément. Qu'est-ce que c'est! Le regard tourné sur le troisième, sur Jésus, la façon de regarder Jésus les rend tellement différents qu'ils deviennent Inconnaissables. L'un des deux regarde Jésus avec haine et ironie, avec mépris: tout son passé de sang devient léger comme une plume par rapport à ce regard de désespoir. L'autre regarde Jésus avec admiration, avec amour. Ce regard lui soulève son cœur, éclaire son visage. Son passé de sang disparaît comme la neige lu soleil.

Ce sont seulement deux hommes parmi les pires de l'humanité, mais ils la représentent tout entière. Tous les hommes ont leur charge plus ou moins lourd plus ou moins apparent plus ou moins remarquable de péché et de mal. Rien ne les différencie. Ils n'ont rien de substantiellement divers. Mais c'est leurs yeux qui les font appartenir à deux mondes opposés. Celui qui regarde Jésus avec amour se retrouve uni à tous les autres qui le regardent avec amour, il sent grandir, à partir de l'amour pour Jésus, une fraternité nouvelle et une justification intérieure qui recouvre et annule tout le mal et le péché dont il s'était rendu complice et coupable. Celui qui regarde Jésus avec ironie et haine se retrouve seul et sans espoir, il se retrouve déchiré intérieurement, incapable de vivre et de donner de l'amour aux hommes, il se retrouve à employer le mot "amitié" pour indiquer la commune possession de la même haine pour Jésus et pour ceux qui lui appartiennent. Il y a deux mondes. Le monde qui se comptait en Jésus même s'il est sur la croix: c'est le monde du Père. Beaucoup d'hommes, pécheurs comme les autres, l'habitent, en souffrant les mêmes peines que les autres, mais leur regard se pose sur Jésus avec amour et obéissance.

Le monde qui se révolte à la douleur, qui refuse sa souffrance, qui repousse son mal acquis avec le péché, ce monde regarde Jésus avec ironie et mépris.

Sur le Calvaire il y a les deux mondes. Sur le Calvaire on peut choisir auquel des deux mondes nous voulons appartenir.

 

16.

Matthieu 27,45: "Il se fit nuit sur toute la terre".

La Lumière a disparu. Pendant que la véritable "lumière du monde" va mourir, même son "ombre" doit disparaître. Les réalités créées, comme justement la lumière, sont l'ombre de la seule véritable réalité qui est le Christ, comme dit St Paul. L'ombre disparaît lorsque la Réalité disparaît. Exactement comme s'en va la lumière et la joie des yeux de l'homme qui a décidé de ne plus regarder vers le Seigneur.

Il se fit nuit.

C'est le moment le plus important de l'histoire de l'humanité, de l'histoire de l'amour de Dieu, le moment où l'amour sur la terre est plus fort et intense. C'est le moment oÙ Dieu Amour est plus que jamais présent et actif dans le cœur d'un homme hall et mis à mort.

Mais lorsque Dieu vient sur la terre, lorsque Dieu y agit, l'homme ne peut pas voir. C'est pourquoi il se fit nuit.

Dieu agit dans la nuit.

Dieu ne veut pas se cacher. Mais l'homme ne peut le voir que lorsqu'il est passé, comme il fut révélé à Elie sur la montagne.

Lorsque Dieu est à l’œuvre, l'homme ne voit rien: ses yeux sont habitués seulement aux choses qui passent, à la réalité de la chair, à ce oui est superficiel. L'action et la présence de Dieu aveugle les yeux de l'homme ainsi que le soleil.

C'est pourquoi Dieu agit dans la nuit de l'homme: il le rencontre dans les rêves, il se bat avec lui dans l'ombre, il vient sur terre dans la chair lorsque les hommes dorment. Dieu agit lorsque l'homme ne voit et n'entend pas, lorsque l'homme n'agit pas; son action ne doit laisser aucun doute ni doit se confondre avec celle de l'homme. C'est pourquoi il agit dans la nuit. La nuit est habituée à accompagner l'action et la Présence de Dieu, la voilà donc en ce moment où l'amour du Père et l'obéissance du Fils se fondent.

La nuit cache à l'homme les secrets de Dieu, la réalisation de ses merveilles. L'homme les trouvera comme une surprise où il a été absent, sinon d'empêchement. L'homme trouvera les merveilles de Dieu accomplies, comme les femmes trouveront la pierre du sépulcre déjà enlevée.

Et cela advient encore. De temps à autre pour l'homme de Dieu il se fait nuit. De temps en temps la nuit lui est consentie.

Accepter ? Lutter ? C'est le moment de l’œuvre de Dieu.

Il faudrait jouir, c'est l'attitude suggérée par l'expérience de la foi.

Il y a une attente confiante dans le cœur qui ne voit pas mais qui connaît les façons de faire du Dieu de l'Amour: confiance de la foi et douleur de la chair se confondent dans l'espoir.

 

17.

Matthieu 27,46:

"Elì, Elì; lemà sabactàni?"

L'obscurité de la nuit imprévue de l'après-midi n'enlève pas seulement les couleurs aux réalités environnantes, mais elle pénètre aussi l'âme de Jésus. Il ne voit plus son Père. Il s'était habitué à le contempler pendant ses nuits de prière, il en voyait les signes pendant la journée, il en admirait les oeuvres merveilleuses de sa création et en regardant les oiseaux tout simplement il réussissait à en voir l'amour concret et fidèle pour les hommes. Les yeux de son cœur s'étaient faits attentifs au Père, mais à présent il s'est fait nuit: il ne le voit plus. Il comprend alors le cri du psalmiste qui exprime le tourment intérieur de beaucoup d'hommes habitués à vivre avec Dieu, à considérer la vie comme un signe de la présence divine et qui tout à coup s'aperçoivent que la vie s'enfuit, que ce qu'ils ont fait de bien et ce qu'ils ont supporté en fatigues ne donne pas le fruit espéré. Il comprend ce cri, il le prend sur soi. Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi? Pourquoi n'es-tu plus là? Pourquoi n'emploies-tu pas ta puissance à mon égard, vu que je suis à toi? Pourquoi te laisses-tu vaincre par les forces du mal qui m'assaillent''

Jésus vit au bord du désespoir vécu par beaucoup de gens, pour ne pas dire par tous. Oui, en certains moments de la vie, j'ai moi-même prononcé ces paroles: Dieu n'agit pas pour moi. Il semblait s'être mis contre moi. Je ne le voyais plus.

Jésus toutefois s'adresse à ce Dieu qu'il ne voit pas. Il crie vers lui, même s'il ne le voit pas, s'il ne le sent pas. Lui, le Père, continue, au contraire, à voir, à entendre Jésus.

Et même nous pourrions à présent rappeler à Jésus ce que Lui-même avait affirmé quelques heures auparavant: Moi et le Père sommes un! Jésus, Tu ne vois pas le Père car tu es uni à Lui. Tu es tellement uni à Lui, tellement immergé en Lui, que tu ne peux le voir. Toi, à présent, tu es devenu l'Amour, tu es l'Amour du Père pour tous. Tu ne peux le voir non parce qu'il s'est éloigné, mais parce que tu vas atteindre la plénitude de l'unité d'amour avec Lui. Or ton obéissance est arrivée de ne plus distinguer deux amours, au point de confondre ton Esprit avec le Sien le Tien et celui du Père, mais un seul.

Si je pouvais le dire à tous ceux qui souffrent l’"abandon de Dieu" après avoir fait sa volonté! Quelle consolation que de savoir qu'au moment de l'obéissance plus choquante et sans consolation ni clarté, Dieu même se confond en nous,,jusqu'à nous transformer en amour pur, en don gratuit, à sa ressemblance!

Père, dans tes mains je remets mon esprit.

 

18.

Matthieu: 27,54: "Le centurion et ceux qui avec lui montaient la garde à Jésus... disaient: Vraiment, c'était le Fils de Dieu!"

Trop tard, pensaient les hommes! Désormais il est trop tard! Mais ce n'est certainement pas cela le réflexe de la vie du Crucifix, de Jésus. Il est venu justement pour cela, pour que les hommes, les pécheurs, s'aperçoivent de Dieu, de son Amour, pour que, en le voyant, ils en soient illuminés. Avant que Jésus ait porté à bon terme son amour de Fils, les hommes pouvaient seulement en partie s'en apercevoir. Seulement à présent ils peuvent atteindre la perfection de la foi, du moment où il a donné sa vie, où il l'a confiée totalement à son Père.

Le centurion, précédé seulement par le larron, est le premier à s'apercevoir de Dieu en regardant Jésus mort, tué par la haine.

En regardant Jésus, le centurion s'est aperçu de la Présence d'un seul amour, dissimulé par les clameurs, les bruits, les ténèbres et la haine. C'est l'amour d'un fils qui présente soi-même au Père tel qu'il est, à la merci des ondoiements humains, c'est l'amour d'un Père qui laisse aux hommes la faculté de détruire pour qu'ils constatent que la vie n'existe pas en eux-mêmes, pour qu'ils s'aperçoivent du vide qu'il y a dans leur cœur et qu'ils voient où est l'amour véritable auquel s'approcher pour en être remplis. En regardant le cadavre de Jésus, le centurion s'étonne, ouvre sa bouche en admirant pour dire en une seule expression sa bêtise, son mensonge et la Vérité de Dieu.

Le grain vient de mourir et déjà nous en voyons les premiers fruits. Ce sont justement les soldats qui retrouvent dans leur cœur une vie nouvelle: celle du Fils. "Celui qui a le Fils a la vie". Ils le reconnaissent et voilà qu'en eux se produit un détachement du passé, de l'action qu'ils avaient à peine accomplie, de leur outrage considéré auparavant de la sagesse, de leur propre incrédulité.

Trop tard? No!: c'est le moment, seulement maintenant le temps véritable est venu. Seulement avec la mort de Jésus le temps est venu de la lumière, de la vérité, de la foi, du salut.

Si on disait que le centurion s'est aperçu trop tard, ce serait méconnaître le dessein de Dieu, ce serait considérer inutile, non nécessaire le sacrifice de Jésus. Nous dirons au contraire: merci! Merci à Jésus pour sa mort: c'est par elle que la vie arrive aux hommes, c'est par elle que la grâce vient à nous. ! Nous devrions dire: enfin Jésus est mort! Son Esprit peut ainsi se reverser en nous, son amour au Père peut changer nos, yeux et diriger nos mains vers l'amour aux frères. Merci Jésus pour ta mort: tu peux à présent user de notre corps et de notre cœur pour aimer, pour jouir du Père, pour vivre en reversant en nous ton Esprit! Tu es vraiment le Fils de Dieu! Tu peux à présent user de mes défaites, mort, pour permettre à d'autres de s'apercevoir du Père, en trouvant une vie nouvelle dans ton amitié.